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La GRANDE CÉTOINE BLEUE (Eupotosia mirifica) !
(Coléoptère Scarabaeidae )
 
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Oyez oyez ! "Tournant" depuis 2010 ( 7 ans déjà ! ) avec un minimum d'attention ( pour ne pas dire "solo" ! ), cet élevage témoigne de sa grande facilité, mais aussi de conditions de vie et de développement censément différentes, si ce n'est faussées, en regard de ce qu'elles sont en milieu naturel. De ce fait les illustrations primeront sur les données chronologiques habituellement mentionnées.
  
Intro !

Décrite à tort comme simple variété de Cetonia affinis, Eupotosia mirifica (Mulsant, 1842) a été découverte au début du 19e siècle, "non loin du département de la Lozère", par Crespon, naturaliste nîmois (Lambillionea, N°1, mars 2004). De nos jours une telle découverte aurait fait la UNE des revues spécialisées, et mis les forums entomologiques du Web en ébullition. A l'époque les "news" allaient moins vite et la trouvaille s'est semble-t-il égarée en chemin, pour finalement sombrer dans l'oubli … et y demeurer durant plus d'un siècle !

Il aura fallu attendre juillet 1975 pour qu'Henri Pierre Aberlenc découvre l'existence de la bête en Païolive, et mette en émoi tous les entomologistes de "France et de Navarre", les coléoptéristes étant bien sûr les premiers concernés. Qu'une minuscule bestiole soit découverte au fin fond de la forêt Guyanaise se comprend aisément, mais qu'une cétoine "hexagonale" aussi grande et belle puisse si longtemps passer inaperçue défie l'entendement, et c'est peu dire ! Bien entendue la jolie bestiole en a fait courir plus d'un, tout en faisant couler beaucoup d'encre ... et de salive !

Présentation !

C'est assurément l'une de nos plus belles et grandes cétoines. C'est également la plus localisée, si ce n'est la plus rare, encore que la notion de rareté soit très souvent relative. Présentement les pièges aériens ont en effet totalement changé la donne, tout comme le piégeage des carabes mis en oeuvre par Michel Tarrier dans les années 70.

Du jour au lendemain de nombreuses "raretés" sont ainsi devenues quasi banalités, démontrant qu'il n'y a pas d'insectes rares, mais seulement des insectes qu'on ne sait pas chasser, tout se résumant à ces 3 maîtres mots : où, quand, comment ! Toute médaille ayant son revers, l'importante progression des connaissances s'est souvent faite au détriment d'insectes rendus accessibles, et de ce fait devenus vulnérables.

Bien qu'elle le mériterait la "Grande cétoine bleue" n'est pas protégée, comme l'est le non moins fameux "Pique-prune". Ce dernier est pourtant très largement répandu en France, gage évident de pérennité, là où la "Grande bleue" doit se contenter d'un véritable mouchoir de poche. Pour l'essentiel son domaine "hexagonal" se résume en effet au bois de Païolive, très original site forestier ardéchois où le végétal et le minéral ne font qu'un.

Cétoines érugineuses (Cetonia aeruginosa), adultes en main.Comme Cetonia aeruginosa ( ci-contre ! ), qui pourrait à juste titre se qualifier de "Grande cétoine verte", Eupotosia mirifica affectionne les hautes frondaisons "canopéennes" où elle passe aisément inaperçue. Elle s'y développe dans les cavités des vieux arbres, essentiellement des chênes, où les larves trouvent le terreau et le bois carié leur servant à la fois de gîte et de couvert. L'insecte adulte se nourrit sur les plaies suintantes des arbres, mais son attrait pour les fruits avancés ( et le vin rouge ! ) peuvent causer sa perte. A Païolive la "grande bleue" se développe également sous le couvert arbustif, dans les cuvettes, rainures, et crevasses rocheuses que sont les "lapiaz" ( géologiquement parlant ! ), où les ans et l'accumulation des feuilles mortes finissent par former le substrat nourricier.

 
La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), adulte, photo 1. La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), adulte, photo 2 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), adulte, photo 3 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), adulte, photo 4 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), adulte en main.
Eupotosia mirifica ! Plus violette que bleue, et plus joyau que bijou !
(taille moyenne 25 mm)
 
 
 Dimorphisme sexuel !
La distinction des sexes est à la fois aisée et assez subtile. Comme les photos ci-dessous le montrent, le dernier segment abdominal ventral (= sternite ! ) est plus ou moins triangulaire chez la femelle, et surtout totalement et abondamment ponctué. Chez le mâle ce segment est plus étroit, plutôt trapézoïdal, avec zone médiane nettement plus lisse que ponctuée. Un second critère, tout aussi fiable et discret, intéresse le "pygidium". Ce dernier est régulièrement bombé chez les mâles, et 2 "fossettes" sont nettement visibles chez la femelle.
 
Elle ! ... La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  sternite femelle............ La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  sternite mâle. ... et lui !
ci-dessus : dimorphisme du dernier sternite;
ci-dessous : dimorphisme du pygidium
Elle ! ... La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), pygidium femelle........... La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), accouplement, vue arrière. ........La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), pygidium mâle. ... et lui !
 
 
 
... et accouplement ! 
La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  accouplement, photo 1. La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  accouplement, photo 2 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  accouplement, photo 3 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  accouplement, photo 4 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  accouplement, photo 5
Le moment venu, au coeur de l'été, la bête ne se fait prier ... et cette vidéo en témoigne ! 
 
 
 L'oeuf ... et la larve !
Les oeufs sont bien sûr pondus après l'accouplement initial, essentiellement en juillet-août. Ils sont émis individuellement, au sein d'une petite logette aménagée dans la masse du terreau. La taille importante des oeufs fait que la ponte est logiquement très échelonnée (1 à 2 oeufs /jour). Compte tenu de la période estivale, l'incubation est rapide, de l'ordre de la semaine.

Le développement de la larve se fait en seulement 3 stades (L1-L2-L3), là où les chenilles en comptent 5, et souvent plus d'une dizaine chez les insectes à métamorphose incomplète (blattes, sauterelles, grillons etc. ). Il s'ensuit évidemment une importante prise de volume, et de poids, lors des 2 mues précédant la nymphose. En nature le cycle complet demande 2 ans, et porte sur 3 années civiles (schématiquement, l'oeuf pondu en juillet 2017 donnera donc une "grande bleue" en juillet ... 2020 ! ). En élevage "intérieur", et donc hors hivernage, le cycle est ramené à 1 année pleine "à cheval" sur 2 années civiles !

 
La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), oeufs. La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), oeufs avec allumette/échelle.............. La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  larves naissantes, photo 1. La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  larve naissante, photo 2 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  larves naissantes, photo 3.
ci-dessus à gauche : les oeufs ! Vous noterez l'importance de leur volume en regard de l'allumette; à droite : larvules récemment écloses.
ci-dessous à gauche : jeunes ... et moins jeunes larves ! à droite : illustration des stades larvaires, et larves à terme.
 
La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  jeunes larves, photo 1. La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  jeunes larves, photo 2 ........... La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  jeunes larves, photo 3 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), larves âgées.
 
 
 La nymphe !
La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), nymphe en coque, photo 1. La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), nymphe en coque, photo 2 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), nymphe en coque, photo 3 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), nymphe en coque, photo 4
En automne, une fois parvenue au terme de son développement, la larve confectionne une sorte de coque ovoïde constituée de terreau et d'excréments agglomérés avec de la salive, la paroi interne étant lissée avec le rejet intestinal. Elle va s'y transformer en nymphe, puis en adulte peu avant l'hiver. L'insecte va ainsi passer la mauvaise saison, et même au-delà, avant de briser sa logette et d'émerger au plus tôt courant juin.
 
 
 Du blanc au bleu !
La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  chromatogenèse, photo 1. La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  chromatogenèse, photo 2 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  chromatogenèse, photo 3 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  chromatogenèse, photo 4 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  chromatogenèse, photo  5 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  chromatogenèse, photo 6
 Illustration de la chromatogenèse, et donc de l'acquisition progressive de la coloration définitive.
ci-dessus à gauche : aspect de l'insecte venant de passer à l'état adulte (= mue imaginale); à droite : l'insecte "fini", 5 jours plus tard; ci-dessous : progression chromatique sur vues ventrales. Le durcissement de la carapace (= sclérification) est toujours plus long, de l'ordre d'une dizaine de jours.
La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  chromatogenèse, vue latérale. La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  chromatogenèse, vue ventrale, photo 1. La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  chromatogenèse, vue ventrale, photo 2. La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica),  chromatogenèse, vue ventrale, photo 3.
 
 
 
Scènes d'élevages !
La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), scène d'élevage, photo 1. La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), scène d'élevage, photo 2 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), scène d'élevage, photo 3 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), scène d'élevage, photo 3
Mélangé à du terreau, un broyat de feuilles mortes de chêne peut suffire pour les larves, mais quelques plus consistants morceaux de bois carié sont toujours appréciés. La banane a l'avantage de mettre tout le monde d'accord, larves comme adultes, d'où la fréquente utilisation de ce fruit ( de préférence "invendable" ! ) dans le cadre des pièges aériens destinés aux captures sur le vif des cétoines, entre autres espèces d'insectes. Dans la gamme des "inventables" vous noterez que certains fromages, déjà très odorants par nature, font merveille pour attirer les très beaux papillons que sont les Apatura :-) !
 
 
La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), scène d'élevage, photo 5 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), scène d'élevage, photo 6 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), scène d'élevage, photo 7 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), scène d'élevage, photo 8 La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), scène d'élevage, photo 9
Ces trois espèces (Eupotosia mirifica, Osmoderma eremita, et Cetonia (Protaecia ou Cetonischema) aeruginosa, sont présentement contraintes de faire "poubelle commune", et à l'évidence le volume important (100 litres ) fait que cela se passe plutôt bien. Dans la nature aeruginosa et osmoderma peuvent pareillement partager le terreau d'une même cavité, mais cela reste semble-t-il exceptionnel. Par contre, à ma connaissance, cette forme de "colocation" n'a jamais été observée entre mirifica et aeruginosa, toutes deux présentes en Païolive.
 
 
Qui suis-je !
Les larves de cétoines ayant un logique "air de famille", et leurs milieux de vie pouvant être identiques, voire parfois partagés, il est évidemment souhaitable de pouvoir les identifier, et à cet égard la zone du "raster" ( = "râteau" ! ) constitue un bon critère ... même s'il ne peut tout résoudre !
 
La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), larves en main. La grande cétoine bleue (Eupotosia mirifica), raster. ...........Cétoines érugineuses (Cetonia aeruginosa), larves en main. Cétoines érugineuses (Cetonia aeruginosa), raster. ............Pique prune (Osmoderma eremita), larves en main. Pique prune (Osmoderma eremita),  raster.
La zone du bien nommé "râteau", une aide à l'identification larvaire ... quelques exemples !
ci-dessus à gauche : la Gde cétoine bleue (Eupotosia mirifica); au centre : la Cétoine érugineuse (Cetonia aeruginosa); à droite : le fameux Pique-prune (Osmoderma eremita); ci-dessous à gauche : la classique cétoine dorée (Cetonia aurata); à droite : la cétoine à 8 points (Gnorimus octopunctatus)
Cétoine dorée (Cetonia aurata), larves en main. Cétoine dorée (Cetonia aurata), raster, photo 1. Cétoine dorée (Cetonia aurata), raster, photo 2............. Cétoine à 8 points (Gnorimus octopunctatus), larves en main. Cétoine à 8 points (Gnorimus octopunctatus), raster, photo 1. Cétoine à 8 points (Gnorimus octopunctatus), raster, photo 2.
 

 En guise de conclusion ...

Selon une étude scientifique publiée dans la revue numérique Plos One du 18 octobre 2017 (*), près de 80% des insectes ont disparu des réserves naturelles d'Allemagne (dont 37 sites Natura 2000 ! ), et cela depuis 1989 (année de référence), soit en l'espace d'à peine 3 décennies. L'agriculture industrielle et l'utilisation massive de pesticides et d'engrais de synthèse sont bien sûr en cause. Un véritable Armageddon écologique selon The Guardian.
(*) http://journals.plos.org/plosone/article?id=10.1371/journal.pone.0185809
 
... et ce n'est pas mieux en France ! Fut un temps, pas si lointain, où il fallait une bonne dose d' "huile de coude" pour nettoyer nos carrosseries et pare-brise, maculés par les impacts d'innombrables insectes. Ces derniers "s'éclatant" pareillement sur les vitrages des cabines de pilotages des TGV, il s'ensuivait une gêne parfois importante, d'où sa prise en compte par la SNCF. C'est ainsi qu'en 1993 une étude contractuelle a été confiée au labo (*), en vue de plus rapidement et facilement neutraliser les salissures causées par le "crash" de ces insectes. De nos jours, est-il besoin de le préciser, nos pare-brise restent quasi vierges, et le problème des vitrages TGV ne doit plus guère se poser ... faute de "participants" ! ... si je puis dire !

(*) Ce travail a permis au labo d'acquérir un Macintosh Classic II ( le "top" à l'époque ! ) ... mon tout premier ordi !

 
 
Fin
  
les pages entomologiques d' andré lequet : http://www.insectes-net.fr