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le MORIO ou MANTEAU ROYAL (Nymphalis antiopa) !
(Lépidoptère Nymphalidae)
 
 
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Intro !
 
Morio (Nymphalis antiopa) frais eclosLa bête est bien belle (voir ci-contre), et son descripteur (Carl Von Linné) ne s'y est pas trompé en l'appelant Antiopa, du nom de la plus belle jeune fille de Thèbes. Par-delà cette référence, et ce double hommage rendu à la beauté, j'ajouterais que ce papillon n'a pas son pareil pour faire rêver le néophyte ... et encore titiller le plus blasé des entomologistes !
 
Rareté faisant, la bestiole se dévoile avec parcimonie, suggérant ainsi plus qu'elle ne montre, principe de séduction ô combien éprouvé .... et "redoutable" ! Dès lors, et vous le comprendrez, les entomologistes normalement constitués n'y peuvent résister, d'où leurs yeux de Chimène ... pour le beau Morio !
 
Présentation !
 
Parfois appelé "Manteau royal", ce papillon relève des Nymphalidae, très nombreuse Famille de papillons "de jour" représentée en France par 130 espèces. Avec une envergure atteignant 75 mm, c'est la plus grande des "Vanesses" françaises, et même européennes. Le Morio occupe toute la France, et bien plus encore, puisqu'il couvre la bagatelle de 3 continents, à commencer par la presque totalité de l'Europe, l'entière Asie, et l'Amérique du Nord... excusez du peu !
 
En dépit de l'immensité de son territoire, et d'un "niveau de vie" atteignant 2000 m, ce papillon est d'une très remarquable constance morphologique, au grand regret des amateurs de variations en tous genres. Le Morio peut se rencontrer un peu partout, y compris dans les parcs, mais il apprécie les lisières forestières, ou encore la proximité des cours d'eau, le "must" restant les zones dites "humides" ( telle la Grande Brière, en Loire-Atlantique ) où croissent saules et bouleaux, ses arbres de prédilection.
 
 
Morio (Nymphalis antiopa) sur le vf, photo 1 Morio (Nymphalis antiopa) sur le vf, photo 2 Morio (Nymphalis antiopa) sur le vf, photo 3 Morio (Nymphalis antiopa) sur le vf, photo 4
 beau beau le Morio ! .... tel un certain lavabo !
 
 
A nul autre pareil, et donc aisément reconnaissable, le Morio était jadis très commun, pour ne pas dire abondant. Sans que l'on sache véritablement pourquoi, ses effectifs se sont considérablement amenuisés, et de nos jours le Morio est devenu relativement rare, au point de toujours s'observer à l'unité, et d'être même protégé en Ile-de-France (Arrêté du 22 Juillet 1993), ainsi que dans les Cantons Suisses de Vaud, Thurgovie, et Schaffhouse.
 
Le dimorphisme sexuel est inexistant, mais la femelle est en principe un peu plus grande, avec un abdomen censément plus "rebondi" .... encore faut-il pouvoir comparer ! .... et que la femelle n'ait point pondu ! Le Morio n'a qu'une génération annuelle, avec éclosions en Juillet, mais le cycle biologique de la bestiole ( ci-dessous décrit ) est en réalité nettement plus original et complexe.
 
 
pour le plaisir ... Morio (Nymphalis antiopa) sur le vf, photo 5 Morio (Nymphalis antiopa) sur le vf, photo 6 Morio (Nymphalis antiopa) sur le vf, photo 7 ... tout simplement !
 
 
Particularités !
 
La longue vie du Morio ....
 
Non content d'estiver, le Morio est un des rares papillons diurnes à hiverner à l'état adulte, d'où une durée de vie excédant la dizaine de mois, ce qui est très long et très inhabituel chez les lépidoptères. Concrètement l'adulte "naît" en Juillet, puis il va très vite estiver, autrement dit fuir les fortes chaleurs en se réfugiant dans la relative fraîcheur de zones plus ou moins ombragées ( sous-bois, surplomb rocheux, lierre feuillu, dessous d'arbre tombé, etc... ) .... où il restera tapi jusqu'au début de l'automne !
 
Octobre venu, la bestiole va brièvement se réactiver, et reconstituer ses réserves graisseuses, avant de se mettre en quête d' un abri pour hiverner ( tas de bois, coin de vieille bâtisse, arbre creux, cavité rocheuse, etc...). Suivant les régions, notre Morio "refera surface" début Mars ( voire fin février ), pour là encore reprendre des forces, mais cette fois en vue de "batifolages procréateurs". Les pontes s'ensuivront logiquement, puis les chenilles, et les éclosions de Juillet viendront ..."boucler la boucle" !
 
Assez curieusement, c'est au sortir de l'hiver que le Morio s'observe le plus fréquemment A cette époque il est en effet très attiré par les chatons des saules, et il est d'autant plus repérable que ces arbres sont encore très peu feuillus, voire dénudés. Bien entendu l'occasion paraît belle pour le chasseur, mais que la capture soit physique, ou simplement numérique, la déception est très souvent de règle car la bestiole a fatalement beaucoup perdu de sa superbe ... comme tout être vivant face aux outrages du temps !
 
en collection depuis 1968 ....Morio (Nymphalis antiopa), exemplaire de collection... et donc quadragénaire !
en dépit de leur extrême fragilité, les insectes se conservent étonnamment bien,
mais les couleurs ne sont plus ce qu' elles étaient !
 
Le déjeuner du Morio ....
 
Contrairement à la très grande majorité des "Rhopalocères" ( = "papillons diurnes" ), le Morio n'a que faire des fleurs, en dehors de ses très printanières agapes sur les chatons des saules. A l'instar de la "Grande tortue" (Aglais polychloros), qui devrait bientôt figurer sur le site, notre antiopa se délecte des exudations (sève et autres) issues des plaies des arbres. A l'automne la bestiole peut toutefois s'observer sur les fruits tombés, à l'instar du très répandu Vulcain (Vanessa atalanta), ou encore du Jason méditerranéen (Charaxes jasius), espèces figurant sur le site.
 
Le "clap clap" du Morio ....
 
Le brusque envol d'un Morio effarouché, ou simplement dérangé, s'accompagne fréquemment de très audibles et curieux claquements des ailes, très comparables ( toutes proportions gardées ! ) à ceux du pigeon décollant à tire d'aile pour mieux fuir le chasseur. Pour certains entomologistes ces "clap-clap" dissuaderaient le prédateur de poursuivre sa proie, mais à mon avis ils ont aussi une fâcheuse tendance à attirer .... le filet à papillons !
 
 
Morio (Nymphalis antiopa) "en main" (photo 1) Morio (Nymphalis antiopa) "en main" (photo 2) Morio (Nymphalis antiopa) "en main" (photo 3) ponte de Morio (Nymphalis antiopa), photo 1
Après la fraîcheur de la nuit le Morio s'offre au soleil pour mieux en capter la chaleur ...avant de prendre son premier essor !.
L'envol est le plus souvent "sans préavis", mais un léger frémissement peut néanmoins le précéder. A droite ( et à voir sur agrandissement); la bestiole fait parfois "chauffer la mécanique" ....comme le fait un avion "au point fixe", et comme le font certains papillons de nuit tels les Sphinx.
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La ponte !
 
Elle a été rendue possible par la gentillesse et le talent de l'ami Marc Guillet (http://passions.entomologie.free.fr/), mais aussi par sa serre qui a permis le délicat hivernage des géniteurs. Qu'il en soit ici très sincèrement remercié !
 
Elle a lieu en Avil-Mai, après l'hivernage, et bien sûr après accouplement. Les oeufs sont joliment côtelés, et régulièrement "déposés-collés" autour des fines brindilles du futur arbre nourricier. Il s'agit essentiellement de saules et de bouleaux, plus rarement d'ormes et de trembles.
 
Quand la bestiole est assidue, et pas dérangée, la ponte a la forme d'un manchon de 20 à 25 mm de longueur, et elle peut compter plus de 200 oeufs. Dans le cas contraire, la ponte peut se voir fractionnée, et prendre l'aspect de courtes bagues ( souvent incomplètement fermées ), regroupant quelques dizaines d'unités.
 
Les oeufs frais pondus sont jaunâtres, et se rembrunissent progressivement, au fur et à mesure du développement embryonnaire des futures chenillettes. A terme, et donc après une incubation de 10 à 15 jours, les oeufs sont devenus noirs ... et les éclosions imminentes.
 
 
ponte de Morio (Nymphalis antiopa), photo 2 ponte de Morio (Nymphalis antiopa), photo 3 ponte de Morio (Nymphalis antiopa), photo 4
de gauche à droite: 1 & 2)- ponte fraîche; 3 & 4)- la même ponte 5 jours plus tard.
( l' oeuf "clair", resté jaune, permet d'apprécier l'évolution des oeufs fécondés)
Cette ponte est très importante, et très typiquement "manchonnée" autour d'une fine brindille ( de saule présentement ! ).
( 220 oeufs ont été dénombrés ... mais après éclosions pour éviter l'omelette ! )
 
 
ponte de Morio (Nymphalis antiopa), photo 5 ponte de Morio (Nymphalis antiopa), photo 6 ponte de Morio (Nymphalis antiopa), prête à eclore
Rien ne semble se passer, ou presque, puis les choses s'accélèrent, et en l'espace de 48 h les embryons se font chenillettes, ce qui se traduit par le noircissement des oeufs ( à gauche et au centre ), et leur éclosion dans les 24 h suivantes. A droite: le grignotage libérateur a commencé, et quelques chenillettes pointent leur "museau"
 
 
eclosions de chenilles de Morio (Nymphalis antiopa) photo 1 eclosions de chenilles de Morio (Nymphalis antiopa) photo 2 eclosions de chenilles de Morio (Nymphalis antiopa) photo 3 eclosions de chenilles de Morio (Nymphalis antiopa) photo 4
 ..... petits Morio deviendront grands .... si Dame Nature leur prête vie !
 
 
ponte de Mrio (Nymphalis antiopa), après éclosion
 Tout a une fin, y compris les éclosions !
Vous noterez que les chenillettes naissantes du Morio dédaignent le "chorion" (enveloppe de l'oeuf),
lequel sert fréquemment de premier repas chez de nombreuses espèces de chenilles.
 
 
La chenille !
 
Comme indiqué à la rubrique "Présentation", le saule et le bouleau sont les arbres nourriciers par excellence, mais la bestiole peut également se développer sur les ormes et les trembles. Les pontes sont souvent déposées sur de jeunes arbres, ou plus exactement sur des arbres de petite taille, tendance fréquente chez de nombreuses espèces de papillons "arboricoles".
 
Les chenilles du Morio sont très fortement grégaires, et dès leur naissance la cohésion se fait au sein d'une toile "communautaire" tissée alentour du rameau et des feuilles nourricières, mais il s'agit plus d'une sorte d'aire de déplacement et de rassemblement, que d'un véritable abri. pour la nichée. Il faut attendre la 5e et dernière mue larvaire pour observer de timides velléités de désunion de la colonie, mais il s'agit plus d'un fractionnement que d'une dispersion, les échanges perdurant plus ou moins entre les groupes "dissidents".
 
Quand le feuillage d'un rameau ou d'une branchette est croqué, la troupe déménage pour re-tisser, re-croquer, re-déménager, et ce jusqu'au terme d'un développement larvaire d'une durée d'environ 5 semaines Cette boulimie collective laisse évidemment des traces prometteuses pour l'entomologiste, le tout étant de ne point arriver trop tard, c'est-à-dire après la dispersion nymphale.
 
Compte tenu de leur coloration noire, et d'un grégarisme très "collé-serré", les nichées de chenilles âgées forment de véritables "boules", souvent repérables à bonne distance pour un oeil aguerri. Quand on voit ces amas de 100 ou 150 chenilles (sinon plus ! ), on imagine mal la relative rareté du Morio, mais le grégarisme favorise la prédation, et plus encore le parasitisme, comme vous le verrez ultérieurement.
 
 
Stade 1  chenilles de Morio (Nymphalis antiopa) au stade 1 (photo 1) chenilles de Morio (Nymphalis antiopa) au stade 1 (photo 2) chenilles de Morio (Nymphalis antiopa) au stade 1 (photo 3) chenilles de Morio (Nymphalis antiopa) au stade 1 (photo 4)
Les "chenillettes" naissantes de la page précédente passent très vite à table,
et prennent non moins rapidement du volume, un peu comme un accordéon se déployant.
(quelques stades 2 sont visibles sur agrandissement, à la droite du logo de la dernière photo)
 
 
Stade 2 chenilles de Morio (Nymphalis antiopa) au stade 2 (photo 1) chenilles de Morio (Nymphalis antiopa) au stade 2 (photo 2) chenilles de Morio (Nymphalis antiopa) au stade 2 (photo 3)
 Les bestioles laissent deviner la future et très typique ligne dorsale de taches rouge orangé,
La photo de droite, montrant le regroupement des mues ( et 2 chenillettes "à la bourre" ! ), illustre parfaitement un des aspects du grégarisme,
à savoir le synchronisme des chenilles formant la colonie, car toutes mangent, "dorment", migrent, et muent en même temps.
 
 
 
les pages entomologiques d' andré lequet : http://www.insectes-net.fr