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L'AEGOSOME !
(Aegosoma scabricorne, Coléoptère Cerambycidae)
 
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Intro !
 
Les idées reçues ont souvent la vie dure, et cela vaut en tout domaine ... y compris en entomo !
... d'où une petite parenthèse à découvrir ... et une invite à démêler le vrai du faux !
 
Présentation
 
couple d'Aegosoma (Collection)L'Aegosoma scabricorne (couple de collection ci-contre) est un Coléoptère plus ou moins brun, dont la taille est généralement de l'ordre de 4 à 5 cm. Il relève de la Famille des Cerambycidae ( = Cérambycidés ) autrement dit des " longicornes".
 
La répartition de l'espèce est discontinue, avec 2 grandes "zones blanches" ( Bretagne, et Nord de la France). Sauf exceptions très ponctuelles l'insecte n'est jamais commun. Signalons enfin que l'Aegosome est parfois attiré par la lumière, ce que j'ai pu moi-même constater à diverses reprises en chassant les papillons nocturnes.
 
L'Aegosome peut se développer dans le bois mort (contrairement au Grand Capricorne du chêne, cf pages entomo.), mais il affectionne surtout les parties dépérissantes des arbres âgés, malades, ou lésés. L'espèce n'est pas considérée comme nuisible, mais elle peut parfois poser problème, du moins très localement.  
 
Le Hêtre a sa préférence, mais on peut trouver cet insecte dans de multiples essences non résineuses. Personnellement, et outre le Hêtre, j'ai surtout trouvé l'Aegosome dans le Frêne, le Sycomore, le Peuplier, le Cerisier, et tout récemment le Pommier.
 
L'Aegosome est nocturne, apte au vol, et il apparaît le plus souvent en août, c.a.d. tardivement par rapport à la majorité des autres espèces xylophages (= "mangeurs de bois"). Dans la journée il se réfugie dans les cavités des arbres, sous les écorces déhiscentes (= décollées), dans les entrelacs du lierre quand il est présent .... et dit-on dans les anciennes galerie larvaires .... mais là je demande à voir ... d'où le "vrai ou faux" ci-dessous !
 
aegosome adulte "in natura" (photo 1) aegosome adulte "in natura" (photo 2) aegosome adulte "in natura" (photo 3) aegosome adulte "in natura" (photo 4) aegosome adulte "in natura" (photo 5).
l'Aegosome (Aegosoma scabricorne) compte parmi nos plus grands longicornes.
 
Vrai ou faux ?
 
En 1929, François Picard (1) écrivait à propos de notre Aegosome: "le matin, jusqu'à 9 h, il se tient à l'entrée de son trou qu'il bouche avec sa tête". En 1978, André Villiers (2) écrit à son tour ".... et se tiennent, durant le jour, dans les galeries larvaires dont ils obstruent l'orifice avec leur tête,". En 2000 enfin, Gaëtan du Chatenet (3) reprend l'assertion en ces termes: "Durant le jour dans les galeries larvaires, dont il obstrue l'entrée avec sa tête". Accessoirement, dans les 2 dernières citations, vous noterez l'usage du verbe "obstruer", là où "obturer" m'apparaît à la fois plus approprié, et plus conforme à la citation initiale.
 
Ayant pas mal "fréquenté" la bestiole, je doute qu'elle puisse rentrer dans un trou de sortie, et de surcroît à reculons, car l'étroitesse de la galerie rend tout retournement impossible. Je peux certes me tromper, mais ce genre de situation me paraît plutôt correspondre à des insectes en instance d'émergence. J'en veux pour exemple le Grand capricorne du chêne, que l'on surprend parfois sur son pas-de-porte, en l'attente du crépuscule .... et donc pour lui de " l'heure de la sortie " .... comme dans la chanson !
 
Si quelqu'un à vu, de ses yeux vu, un Aegosome rentrer dans une galerie larvaire, et s'y tenir comme décrit ci-dessus (tête obstruant l'orifice), je suis bien sûr preneur des 2 mains, et prêt à faire mon mea culpa ici même. En attendant, et jusqu'à preuve du contraire, permettez-moi de douter !
 
(1) Faune de France, 20, Coléoptères Cerambycidae, Editions Paul Lechevalier; (2) Faune des Coléoptères de France, Cerambycidae), Editions Lechevalier; (3) Coléoptères phytophages d'Europe, N.A.P. Editions.
 
Ce n'est pas un insecte rare .... aegosome adulte  mâle (photo 1) aegosome adulte  mâle (photo 2) ... mais il abonde rarement !
La prise en main ... un rituel valant signature sur ce site, tout comme l'allumette faisant office d'échelle !
 
Dimorphisme sexuel
 
Les sexes sont distincts, et comme chez de nombreux longicornes, la femelle est aisément reconnaissable à ses antennes plus courtes. Présentement elles ne dépassent pas les 2/3 de l'abdomen, là où celles du mâle atteignent l'extrémité abdominale (ci-dessous à gauche). Le second critère consiste en la présence d'un ovipositeur (= oviscapte) rigide qui dépasse l'abdomen d'un bon cm .... quand il n'est pas rétracté !
 
Un autre critère concerne la forme du thorax, mais pour bien l'appréhender il est préférable de disposer des 2 sexes. Les clichés ci-dessous montrent le contour sub-triangulaire du thorax femelle, et la forme plus quadrangulaire du mâle.
 
couple d'Aegosoma (collection) femelle d'Aegosome Ovipositeur d'Aegosome Aegosome : thorax du mâle Aegosome : thorax de la femelle.
de gauche à droite : 1)- couple de collection, femelle à gauche; 2)- femelle avec ovipositeur évaginé;
3)- détail de l'ovipositeur; 4)- thorax du mâle; 5)- thorax de la femelle.
 
 
couple d'Aegosoma  Couple d'Aegosoma Couple d'Aegosoma (en main) Tronçon de pommier attaqué à coeur par les Aegosomes
de gauche à droite : 1)- couple. Femelle en haut, avec ovipositeur apparent; 2)- Couple. femelle en haut, avec ovipositeur "escamoté"; 3)- couple. Femelle en bas, avec l'ovipositeur apparent. 4)- tronçon basal (35 cm de diamètre) d'un pommier trouvé abattu et débité. Les nombreuses galeries, de surcroît à coeur, témoignent de l'efficience des mandibules car le bois était encore très dur et non dégradé, contrairement au cerisier du "coup de bol" ci-après relaté. Ce tronçon est pour partie à l'origine des illustrations de cette "page entomo".
 
La ponte
 
Elle suit bien sûr l'accouplement, et la forme très particulière des oeufs, alliée à leur dureté, font qu'ils sont littéralement "plantés" dans les interstices de l'écorce de l'arbre nourricier. Attirée par mon piège à papillons nocturnes (voir page entomo), et n'ayant nulle envie de la voir s'en prendre à mes arbres, une femelle d'Aegosome s'est retrouvée provisoirement captive dans un bocal, en l'attente de la relâcher là où elle pourrait vivre sa vie.
 
Pris par le temps, 3 jours se sont ainsi écoulés, et au moment de libérer ma captive, je me suis aperçu qu'elle s'était "lâchée", ce qui est fréquent chez les papillons, mais ne l'est pas au pays des longicornes ! Le premier lot comportait déjà 90 oeufs, et ayant conservé la bête pour juger de ses capacités de ponte, un second lot de 94 oeufs a été récolté... et l'insecte avait peut-être déjà commencé à pondre avant sa capture !
 
Aegosoma , tentative d'accouplement Aegosoma : tentative d'accouplement ponte d'Aegosoma scabricorne ponte d'Aegosome (détail) 
de gauche à droite : 1 & 2)- tentatives d'accouplements, mais ces dames n'étaient pas d'humeur !
3 & 4)- les oeufs de l'Aegosome, ensemble et détail. Au total 184 oeufs ont été pondus, et la femelle n'était pas bien grosse !
La forme et la dureté des oeufs permettent de les insérer en bonne place.
 
.... et suite logique !
Aegosoma, larve naissante, photo 1 Aegosoma, larve naissante, photo 2 Aegosoma, larves naissantes, photo 3
Larves naissantes d'Aegosoma scabricornis !
.... que de chemin à parcourir ( et de bois à ronger ! ) avant de devenir bel Aegosome !
(remarquer, au centre, la conformation acérée des toutes jeunes mandibules)
 
"Coup de bol" ....
 
Le hasard faisant parfois bien les choses, je suis tombé, à la mi-juin 2004, sur un billot de cerisier (50 cm x 30 de diamètre) portant de très gros trous de sorties. Certains étaient manifestement anciens, mais d'autres encore "bouchonnés" s'annonçaient prometteurs, plusieurs générations d'Aegosomes pouvant en effet se succéder, si le volume du bois est suffisant.
 
Le bois en question étant particulièrement dégradé, il ne m'a pas fallu longtemps pour constater qu'il était "habité", et pour tout dire véritablement surpeuplé. De fait 10 nymphes récentes ont été aisément débusquées, ainsi que 35 larves âgées, pour la plupart en loges (et donc en pré-nymphose). A noter l'absence totale de jeunes larves, l'extrême dégradation du bois le rendant inexploitable pour une autre génération.
 
Les images ci-dessous témoignent de cette manne (au demeurant assez exceptionnelle), étant entendu que toutes les larves et nymphes ont été placées en "nurserie", autrement dit en logettes artificielles, et que le moment venu les adultes iront repeupler la campagne nantaise !
 
larves d'aegosomes larves et nymphes d'aegosomes (in situ) nymphes d'aegosomes
de gauche à droite: 1)- larves à terme; 2)- larves "in situ"; 3)- nymphes
 
 
imago "naissant" de Aegosoma scabricorne imago immature d'aegosome imago mature d'Aegosome
Suite et fin, si je puis dire !
à gauche: mue imaginale (toute fraîche !) d' Aegosome;
au centre: imago mâle immature (abdomen encore blanc et distendu); et mature (à droite).
 
La larve
 
Au terme de son développement, lequel demande 2 à 3 ans, la larve de l' Aegosome atteint une taille respectable, de l'ordre de 5 à 6 cm. L'heure de la nymphose venue elle se constitue une logette, et à l'instar du Grand Capricorne du Chêne elle prépare la sortie de l'insecte adulte qu'elle deviendra. En l'occurrence il s'agit d'une galerie de sortie, l'adulte n'étant pas apte à creuser le bois pour gagner l'air libre.
 
Suprême astuce, la larve "bouchonne" cette galerie à l'aide de fibres de bois qu'elle arrache, et compacte fortement. La future nymphe sera ainsi protégée de toute intrusion extérieure, et le moment venu l'adulte pourra facilement se libérer en arrachant les fibres en question.
 
Aegosome (Aegosoma scabricorne) larves âgées, photo 1. Aegosome (Aegosoma scabricorne) larves âgées, photo  2. Aegosome (Aegosoma scabricorne) larves âgées, en main.. Aegosome (Aegosoma scabricorne) larves  tout venant, en main
de gauche à droite: 1)- larves d'Aegosomes, la plus grosse à terme; 2)- les mêmes, avec l'incontournable allumette/échelle;
3)- toujours les mêmes, en main; 4)-autre exemple avec du "tout venant".
 
Aegosome (Aegosoma scabricorne) , tête de larve. Aegosoma: bouchons fibreux des loges nymphales
à droite: gros plan de la tête d'une larve d'Aegosome. Remarquer la puissance des mandibules.  à gauche:  exemples de "bouchons" pré-nymphaux typiques La partie concave ( bout soufré de l'allumette ! ) correspondant au côté "loge".
 
La nymphe
 
C'est l'homologue de la chrysalide du papillon, et la préfiguration du futur adulte qui prendra forme à la dernière métamorphose, c'est-à-dire lors de la mue dite "imaginale". Les futures pattes et antennes ( entre autres organes ! ) sont bien visibles, et les sexes sont déjà identifiables. Chez l'Aegosome le stade nymphal est relativement bref, de l'ordre du mois.
 
nymphe (vue ventrale) nymphe (vue latérale) nymphe (vue dorsale)
 vues ventrale, latérale, et dorsale, d'une jeune nymphe d'Aegosome (48 h d'existence !)
 
 
et quand tout se passe bien .... 
 
émergences et .... duo d'Aegosomes mâles  Envol d'Aegosome ...."décollages" !
 
En guise de conclusion !
 
Au travers des "Aegosomes forgerons" , je vous invite à découvrir mes "Historiettes naturalistes"....
 
.... si ce n'est déjà fait !
 
 
FIN
 
les pages entomologiques d' andré lequet : http://www.insectes-net.fr