Intro !
A sa manière Dame Nature a en effet écrit une partition non moins originale, car notre cigarier pourrait pareillement s'appeler le "poinçonneur des noisetiers". Certaines feuilles de cet arbuste peuvent en effet se voir transformées en véritables passoires, et cela de jour comme de nuit tant les minuscules bestioles font preuve d'un bel appétit ... à toute heure !
Présentation !
Pour les initiés le cigarier du noisetier est un coléoptère Curculionidae, autrement dit un "charançon", au sens large du terme. Il relève des Attelabidae, Famille représentée en France par plusieurs dizaines d'espèces. Toutes sont phytophages, d'où la diversité des végétaux concernés, mais aussi des modes opératoires. Il s'ensuit logiquement des cigares différemment concoctés et conformés ( courts, allongés, coniques, cylindriques ! ) ... avec à la clé de bluffants savoir-faire !
Bien entendu ces "cigares" ne sont pas là pour la "déco" (encore qu'ils fassent leur petit effet quand ils sont nombreux ! ), puisqu'ils servent de réceptacles pour les oeufs, mais aussi de gîte et couvert pour les larves. En outre ils permettent de "tempérer" les excès de la météo, tant positifs que négatifs, tout en limitant l'inévitable impact de la prédation ... du moins autant que faire se peut !
Comme le cigarier du bouleau ( Deporaus betulae, cf. "page entomo" dédiée ), celui du noisetier doit commencer par tarir la circulation de la sève dans la feuille de son futur cigare, ce qui entraîne logiquement son flétrissement, et favorise ainsi sa "maniabilité". Comme son nom l'indique, le noisetier a sa préférence, mais à défaut ( ou par goût ! ) il peut "se les rouler" sur d'autres arbres, tels que l'aulne et le bouleau.
Quand celui du bouleau "mâchouille" la nervure centrale (sans toutefois la couper car le cigare y sera un temps suspendu), celui du noisetier la coupe carrément. C'est donc le limbe de la feuille, incomplètement sectionné (comme ci-dessous à droite) qui va retenir le cigare ... ni trop ni trop peu là aussi ! A découvrir ... disons en temps voulu !
Toujours à titre comparatif le premier nommé enroule la feuille sur elle-même comme on le fait d'un tapis, là où le second la plie préalablement en 2, dans le sens de la longueur, et ce avant de la rouler comme vous le faites d'une serviette de table ... et cette vidéo est parfaitement explicite !
De fait, la rigidité de la nervure centrale s'y oppose nettement, ce qui amène la bestiole à faire preuve d'une très astucieuse parade. La finalisation du pliage "en deux" de la feuille nécessitant plusieurs allers et retours le long de ladite nervure (faisant office de charnière) la bestiole en profite pour jouer des mandibules, de place en place. Du fait de ces multiples entailles, la nervure perd évidemment une grande part de sa résistance, et devient dès lors plus aisément "enroulable" CQFD !
Quand la Vie continue !
Je rappelle qu' il n'y a pas de cigares sans accouplement préalable, ni d'oeufs sans cigares pour les recevoir, et bien sûr pas davantage de larves sans cigares puisque ces derniers sont consommables ... et de fait consommés !
Comme je l'ai précédemment laissé entendre les cigares sont conçus de telle façon qu'au moment voulu ils finissent par tomber au sol ( par exemple suite à un coup de vent ) car un cigare restant appendu se dessèche à l'excès et devient dès lors immangeable, au grand dam de ses occupants. D'autre part, une fois rendues à terme, les larves abandonnent les cigares pour se nymphoser en terre, superficiellement s'entend. Bien entendu les nervures "mâchouillées", les découpes partielles du limbe , ou encore les pétioles rongés aux 3/4, trouvent là leur double raison d'être, à savoir tarir la sève et générer la chute du cigare en temps voulu.
Nettement plus gros que ceux du cigarier du bouleau, les oeufs de notre rouge bestiole sont simplement déposés à l'intérieur des cigares, et donc non inséré sous l'épiderme de la feuille le constituant. Pour la même raison le cigare disons "noisetier" se verra au plus doté de 2 oeufs, là où celui de son noir et minus cousin pourra nourrir 4 ou 5 larves, si ce n'est plus..
Tout en sachant que les oeufs sont déposés au sein de la partie inférieure du cigare, je ne suis pas parvenu à précisément définir quand ils le sont. L'observation de cigarières en action me donne à penser qu'ils sont émis au terme de la confection du cigare, juste avant l'obturation de la partie basse, au demeurant très imparfaite, du moins en regard du côté opposé très exposé à la pluie ... ceci expliquant cela !
Illustration du développement !
En guise de conclusion !
Une comparaison plus complète avec le cigarier du bouleau me paraît éminemment souhaitable tant les 2 espèces sont représentatives, à la fois par leurs divergences et leurs complémentarités.
D'autre part, pour avoir élevé et observé moultes bestioles en tous genres, et cela des années durant, j'avoue m'être plus d'une fois interrogé sur les notions mêmes d'instinct et d'intelligence, tant la frontière apparaît parfois ténue lorsque les confins de l'une semblent s'arrêter là où ceux de l'autre commencent.