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Les CIGALES !

La CIGALE PLÉBÉIENNE (Lyristes plebeja = plebejus) ... and Co !

(Homoptères Cicadidae)
 
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- Avec mes remerciements à Philippe Ferellec, et à sa très coopérante cigale ! -  
Intro !

En son temps Jean de la Fontaine a magistralement illustré l'imprévoyance, en opposant l'insouciante cigale à une fourmi que chacun sait ô combien laborieuse, et de surcroît peu prêteuse aux dires de notre grand fabuliste.

De nos jours, qui dit cigale dit avant tout Provence, soleil, vacances, farniente, mais par-delà le symbolique, et l'omniprésence d'un chant estival qui lui vaut sa popularité, il faut bien reconnaître qu'il est plus facile d'entendre la bestiole que de la voir, même quand elle vous "crève les yeux". 

Présentation !

Pour l'entomologiste la cigale est un insecte Homoptère, par définition piqueur-suceur, mais aussi porteur de 4 ailes de même nature. Elles sont toujours disposées en toit au repos, et les antérieures sont assimilables à des élytres. La spécificité de la famille des Cicadidés, c'est-à-dire des "vraies" cigales, tient à la totale transparence des ailes.

Selon l'ONEM (Observatoire Naturaliste des Ecosystèmes Métiterranéens) la faune française comporte 24 espèces, essentiellement méridionales. Deux ou trois d'entre-elles semblent néanmoins pouvoir s'accommoder de cieux moins cléments (Massif Central par exemple), et la plus petite espèce de notre faune (Cicadetta montana) passe même pour atteindre l'Angleterre. À noter au passage qu'elle est protégée en Ile-de -France par arrêté en date du 22 juillet 1993.

 

Lyristes plebeja !La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),exemplaire de collection "étalé" Cigale de l'orne ou "Cacan" (Cicada orni): adulte de collection, "étalé". Cicada orni !
Les 2 classiques ... à titre comparatif ! ( en attendant mieux ! )
La cigale plébéienne : la plus grande de la faune européenne, atteint une envergure de 90 à 100 mm.
La cigale de l'orne : plus petite, et plus connue des provençaux  sous le nom de "cacan" n'excède pas 75 mm
 
 
La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), adulte. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), adulte "étalé." La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), adulte en main.
ci-dessus : La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), à juste titre couramment appelée "la grande cigale", atteint une envergure de 100 mm pour une longueur de 35 mm ; ci-dessous : au volume et à la proéminence d'yeux à facettes très performants, s'ajoute la présence d'yeux rudimentaires sous la forme de 3 stemmates (= ocelles) frontaux disposés en triangle. Le tout confère évidemment une excellente vision à la bestiole qui a tôt fait de détecter votre présence, et de prudemment ... "couper le son" !
La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), adulte de face. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), adulte vu de face, détail des yeux. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), adulte vu de face, photo 2.
 
 
Cigales ... in natura ! 
à gauche : exemple d'accouplement; à suivre : posées sur les troncs, nombreuses, et particulièrement ... bruyantes !
 
 
 
Le "chant" ! ( en vidéo ... avec passage à table ! )
 
Les cigales adultes apparaissent vers la fin juin, et le "chant" est l'apanage des mâles. Le "concert" est donné par beau temps, lorsque la température atteint 25 °, le niveau optimal étant de 28°. C'est bien sûr une invite à la pariade, autrement dit un appel sexuel, et selon BENNET-CLARK H (1998) sa puissance atteindrait les158 décibels. Le dispositif sonore, dit "cymbalique", se situe au niveau du premier segment abdominal, et chez L. plebeja les opercules protecteurs sont particulièrement développés et bien visibles ventralement. Faisant office de clapets, ces opercules sont rigides et permettent la modulation et la diffusion de la cymbalisation, puisque tel est le terme consacré. Le relèvement de l'abdomen génère en effet un entrebâillement plus ou moins important desdits opercules, d'où une relation directe entre l'air ambiant et la source sonore sous-jacente. En d'autres termes la boîte musicale de la cigale s'ouvre par le fond, et non par le couvercle !
 
 Pour faire simple je dirais que l'appareil sonore proprement dit est double, et symétriquement disposé. Chaque partie se compose en effet d'une membrane plus ou moins structurée et déformable appelée "cymbale" (et parfois "timbale" ! ), laquelle est en relation avec une très volumineuse cavité abdominale qui fait office de caisse de résonance. C'est un peu le principe du tambour, mais la membrane en question est actionnée par la rétraction d'un muscle spécifique, et entre 2 impulsions elle reprend sa forme initiale du seul fait de son élasticité.

 

"Criket" du "Jour J". Pour rester dans le domaine du comparatif je rappelle les fameux "crickets" qui permettaient aux GI américains du "Jour le plus long" de se reconnaître, et se situer dans l'obscurité. Le "chant" de la cigale relève du même principe, mais la fréquence des impulsions est extrêmement élevée (300 à 900 / seconde selon Michel Boulard, le "Monsieur cigales" du MNHN). J'ajouterais que la réplique touristique de ces "crickets" ( ci-contre ! ) fait un tabac sur les plages normandes du fameux "D-Day" ... et donc du "Jour J" pour les allergiques à la langue de Shakespeare !

 

La "sono" de la cigale plébéienne !
 La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), face ventrale du mâle. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), face ventrale du mâle, opercules relevés. .................La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), détail  de l'appareil sonore................. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), mâle, détail des tympans ou miroirs. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), détail d'un tympan ou miroir ches le mâle.
à gauche : 1)- vue ventrale. L'entrebâillement des opercules de l'appareil cymbalique est généré par le relèvement de l'abdomen .... et vice versa ! 2)- vue générale observable après relèvement ( forcé et donc excessif ! ) des opercules à 90°; au centre : détail et repérage des éléments de la "sono" : 1 = opercules; 2 = muscles; 3 = tympans ou miroirs; 4 = localisation des cymbales, et des orifices d'évacuation de l'air (évents), et donc des sons; à droite : détail des tympans ou miroirs, très fines membranes fortement tendues, avec mise en évidence des typiques irisations. L'ampleur de ce dispositif tympanique donne à penser qu'il participe autant ( sinon plus ! ) à l'émission qu'à la réception, d'autant que le tympan des femelles est nettement plus réduit et en quelque sorte conforme à l'usage.
 
.....................Le muscle en action !.............. la cymbale à découvert ! .......;;;;la totale !.................
La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), mâle, muscle contracté. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), muscle en extension. .................La cigale plébéienne (Lyristes plebeja), localisation de la cymbale. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  mise en évidence de la cymbale. ..............La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  mise en évidence de l'ensemble des constituants du dispositif de cymbalisation.
à gauche : muscle "décontracté"... puis en extension ! Vous noterez la transversalité du travail musculaire, mais je ne saurais dire s'il est généré par les seuls mouvements de l'abdomen ( alternance des relèvements et abaissements); au centre : localisation latéro-dorsale des cymbales, puis mise en évidence après dissection. Telles les lames d'un xylophone, la diversité des nervures chitinisées ajoute à la complexité et la spécificité harmonique du chant, mais aussi au "mécanisme" de la cymbalisation proprement dite; à droite : dissection aidant, vision globale et finalisée de l'ensemble des composants de la "sono" ( côté gauche, en vue ventrale ! ).
 
... et pour mémoire !
 
En son temps J.H. Fabre avait constaté que le chant cessait dès l'instant où il entrait dans le champ de vision de la bestiole, mais qu'il perdurait quand il menait grand tapage à l'abri de ses regards. Pour valider ses observations, et en l'occurrence démontrer la paradoxale surdité des cigales, il avait même fait donner du canon en présence de 6 témoins !

Bien entendu le paradoxe n'est qu'apparent, car les cigales ne sont pas sourdes ... du moins pas complètement ! Les taxer d'entendre ce qu'elles veulent bien serait exagéré, mais leurs "oreilles" sont néanmoins très sélectives, car semble-t-il conçues pour seulement capter leur propre chant, le but principal étant bien sûr de charmer une belle ( et plus si affinités ! ) ... ou de détecter (et évincer ! ) un concurrent un peu trop empressé.

 
La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  tympan ou miroir de la femelle. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  localisation du tympan ou miroir de la femelle. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  détail du tympan ou miroir de la femelle.
Beaucoup plus petit que chez le mâle, le tympan est néanmoins bien présent chez la femelle, et pareillement localisé.
à gauche : prélevé sur un insecte de collection ( laborieusement "décortiqué" pour l'occasion ! ), ce tympan est fatalement très abimé,
mais si besoin était, la persistance de l'irisation témoigne de la nature de l'organe et donc de ses fonctions; au centre et à droite : localisation et détail du tympan, cette fois sur insecte "frais", ou plus exactement congelé.
 

La prise de nourriture ! ( en vidéo ... et en chantant ! )

La vie de la cigale adulte est brève, guère plus d'un mois, et comme tous les insectes dits piqueurs-suceurs elle se nourrit de sève prélevée sur les jeunes rameaux des arbres et arbustes. A en juger par la Cigale de l'orne ( et donc du frêne ! ) qui se complait volontiers sur les pins et les oliviers, les lieux de vie et préférences alimentaires de ces insectes ne semblent pas strictement définis, du moins pour les espèces les plus courantes telles plebeja et orni.

Comme chez les "punaises", autres insectes piqueurs-suceurs non moins connus, le rostre est constitué d'une gaine servant de guide et de protection à un long stylet perforant, faussement monobloc. Ce dernier résulte en effet de l'évolution des mâchoires et maxilles, les 4 éléments ainsi constitués s'organisant de façon à pouvoir légèrement coulisser les uns par rapport aux autres, tout en formant les canaux salivaire et alimentaire.

 
La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  position du rostre "rangé". La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  extrémité du rostre, avec stylet visible. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  rostre en action, photo 1. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  rostre en action, photo 2.
de gauche à droite: 1)- en position de "rangement" le rostre est replié entre les pattes, et plus ou moins maintenu au contact du thorax,
2)- pointant hors de la gaine l'extrémité du stylet rend bien compte de sa finesse; 3 & 4)- le rostre en action sur pin sylvestre !
 
 
La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  mise en évidence du stylet. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  rostre "démonté".
à gauche: après "élimination" de la gaine rostrale, mon allumette étalon donne un bon aperçu de la longueur du stylet, mais aussi de sa structure et de sa finesse; à droite: "démontage" de rostre, avec un cheveu pour référence ! Ardu mais édifiant, agrandissement impératif ! Nota : la longueur et la finesse des maxilles générant un effet "ressort", il s'ensuit un enroulement n'ayant pas raison d'être sur le vif. 

Dimorphisme sexuel et ponte !

Chez toutes les cigales le dimorphisme est en premier lieu "musical", les mâles comme nous l'avons vu étant les seuls à disposer d'une "sono". Cette spécificité se traduit par d'évidentes différences morphologiques, particulièrement visibles chez plebeja tant les opercules de l'appareil sonore sont développés. Plus classiquement les extrémités abdominales de la face ventrale diffèrent là aussi notablement, car les femelles sont dotées d'une robuste tarière, en partie bien visible.

Les oeufs, de 200 à 300, sont le plus souvent insérés par lots de quelques unités, dans des végétaux plus ou moins ligneux et desséchés. Il peut s'agir de branchettes arbustives, mais aussi de vieilles hampes florales d'ombellifères ou d'asphodèles, ou encore de grandes tiges herbacées. En fait il semble que l'insecte soit plus attaché à la qualité du support (et en l'occurrence à un certain moelleux), qu'à sa nature proprement dite.

 
La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  face ventrale du mâle. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  face ventrale du mâle, détail..................... La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  face ventrale de la femelle. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  tarière isolée. La cigale plébéienne (Lyristes plebeja),  détail de la tarière.
ci-dessus à gauche: abdomen du mâle de L. plebeja montrant l'importance des opercules de la "sono", puis détail de l'extrémité abdominale; à droite: vue ventrale de l'extrémité abdominale de la femelle montrant la tarière "in situ" ; puis tarière isolée avec détail de l'apex lancéolé, fortement aplati et dentelé. Nota : cet organe de ponte, également appelé "oviscapte" ou "ovipositeur", permet la préparation du réceptacle des oeufs, leur transit via une gouttière, et bien sûr leur dépôt.
ci-dessous : ( avec un grand merci à Richard Fay ! ) : cigale grise ( Cicada orni ! )  en train de pondre sur un rameau mort d'Amélanchier (Sigonce, Alpes de Hte Provence, mi-juillet 2019). Vous noterez que les végétaux desséchés sont préférés, et au pays de J.H. Fabre les longues hampes d'asphodèles font un tabac !
 
 
les pages entomologiques d' andré lequet : http://www.insectes-net.fr