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La GRANDE SAUTERELLE VERTE !
Tettigonia (= Locusta) viridissima, Orthoptère Tettigonidae
 
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Biologie
 
Ces insectes étaient autrefois très communs, mais ils tendent à se raréfier, voire à disparaître, partout où l'homme cultive, aménage, et entretient. De nos jours ces activités sont en effet trop souvent synonymes de traitements chimiques, et mécaniques, incompatibles avec la survie de l'entomofaune et de bien d' autres espèces animales et végétales (voir conclusion). A cela s'ajoute évidemment l'impact démographique, et l'urbanisation qui s'ensuit.
 
En principe la grande sauterelle est considérée comme ubiquiste, en ce sens qu'elle peut s'accommoder de biotopes très divers, mais pour les raisons précitées elle a le plus souvent déserté nos jardins (où elle s'y goinfrait de larves de doryphores!), tout comme les terres cultivées qu'elle ne dédaignait pas autrefois. Il en va de même des bords de routes et chemins systématiquement passés à la "moulinette" (gyrobroyeur), alors que ces banquettes herbues et florifères sont toujours très appréciées des insectes, d'autant qu'elles constituent bien souvent des zones refuges entre bitume et cultures. Au final la bestiole se voit plus ou moins confinée dans les friches buissonnantes ou arbustives, les abords de haies naturelles, ou encore les lisières boisées.
 
La grande sauterelle est apte au vol, mais comme déjà dit ses vrais essors sont d'ampleur limitée. Le plus souvent elle se déplace "à pattes", ou saute en voletant, ce qui lui permet d' aisément prospecter les buissons, arbres, et arbustes, sites qu'elle affectionne et fréquente assidûment.
 
Bon nombre de sauterelles ont des tendances carnassières, et concernant Tettigonia viridissima, on peut même dire que l'apport végétal est pour elle secondaire, du moins à l'état adulte. Tout insecte qui lui tombe sous la patte (elle saute littéralement dessus) est par principe consommable, et il en va de même des larves, et entre autres des chenilles. Avant la généralisation des insecticides, la Grande sauterelle était d'ailleurs bien connue pour littéralement se gaver de larves de doryphores, d'où son indéniable utilité. Contrairement à de nombreux insectes la Locuste est quasiment active jour et nuit, et ses interminables chants crépusculaires et nocturnes en témoignent.
 
quand la Locuste ..... locuste sur morceau de pomme ...croque la pomme !
Quand il fait chaud, et que l'occasion s'en présente, la Grande sauterelle ne dédaigne pas les fruits mûrs
 
Stridulation
 
Chez les sauterelles, et donc chez l'espèce qui nous intéresse, la stridulation est propre au mâle, et elle est produite au niveau de la partie basale des élytres. Concrètement , la face inférieure de l'élytre gauche porte une nervure dotée de crêtes chitinisées constituant l'archet (ci-dessous). Ce dernier est en contact avec un épaississement nervural de l'élytre droit, et c'est le frottement de ces deux zones, associé au mouvement alternatif des élytres, qui génère la stridulation. Le son est renforcé par des "miroirs", petites zones élytrales amincies et transparentes qui sont assez comparables à la timbale des cigales (cf. page entomo). A noter que la stridulation des criquets est très différemment produite, puisqu'elle résulte du frottement de la face interne des cuisses postérieures sur les élytres, les parties en contact étant là aussi modifiées en conséquence.
 
 
détail de l'archet (MEB)détail de l'archet (MEB)
détail de l'archet (= pars stridens) de Tettigonia viridissima, en microscopie à balayage (X 500 & 750)
 
 
L'appareil auditif, corollaire de la stridulation, se situe de part et d'autre des tibias antérieurs, et un peu en dessous des "genoux" (ci-dessous à gauche). Il est constitué d'une fine membrane, assimilable à un tympan. Contrairement au grillon champêtre (cf. page entomo) cet organe est peu visible chez la grande sauterelle, une excroissance tégumentaire le protégeant et le réduisant à de très étroites fentes latérales (ci-dessous à droite).
 
 
 position des organes auditifs chez la locuste organes auditifs de la locuste
à gauche : localisation des organes tympaniques sur les pattes antérieures;
à droite : renflements bilatéraux ( très discrèts ! ) abritant ces organes, et détail des fentes tympaniques.
 
 
Reproduction & développement
 
La grande sauterelle verte passe à l'état d'adulte en juillet-août, et après maturation sexuelle l'accouplement peut avoir lieu. En fait, comme pour le grillon ( cf. page entomo ), il n'y a pas de véritable copulation, mais dépôt d'un spermatophore ( ci-dessous ) à l'entrée des voies génitales de la femelle. Ce pseudo accouplement est relativement prolongé, de l'ordre de la demi-heure, et pour ce faire la femelle se positionne verticalement tandis que le mâle s'agrippe à sa tarière.
 
 
femelle de locuste avec spermatophore (photo 1) femelle de locuste avec spermatophore (photo 2) femelle de locuste avec spermatophore (photo 3) femelle de locuste avec spermatophore (photo 4)
femelle de locuste avec un spermatophore, de surcroît "tout neuf" ....une double opportunité photographique rare !
 
 
spermatophore de locuste, détail (photo1) spermatophore de locuste, détail (photo2)
gros plan sur le spermatophore ci-dessus !
( vous noterez l'importance de son volume, et une certaine ressemblance avec des attributs mâles ....plus classiques ! )
 
 
Le spermatophore, véritable "sac à spermatozoïdes", est volumineux chez Tettigonia viridissima, et d'aspect plus ou moins gélatineux. Il reste fixé à la base de la tarière, et se vide peu à peu de son contenu dans les voies génitales de la femelle. A terme cette dernière va manger ce qu'il en reste ( ci-dessous ! ) une façon comme une autre de n'en rien perdre. A noter que cette forme de "récupération" est courante dans le règne animal. A titre d'exemple la chenille venant d'éclore va très souvent dévorer l'enveloppe de l'oeuf qu'elle vient de quitter, tout comme le triton va dévorer sa mue, ou la chienne sa "délivrance" après naissance de sa progéniture.
 
 
au pays des locustes....femelle de locuste mangeant son spermatophore (photo 1) femelle de locuste mangeant son spermatophore (photo 2) femelle de locuste mangeant son spermatophore (photo 3) ....rien ne se perd !
femelle de locuste mangeant classiquement l'enveloppe de son spermatophore ...une fois la "semence" absorbée par les voies génitales !
 
 
 
  femelle de locuste avec "vieux" spermatophore (photo 2) femelle de locuste avec "vieux" spermatophore (photo 3) exemple de "vieux" spermatophore
quelques heures ....et coups de mandibules plus tard !
 
 
La ponte (ci-dessous) fait suite à l'accouplement, et elle a lieu dans le sol, la tarière permettant d'y insérer les oeufs. Contrairement aux criquets, ou encore à la mante religieuse (cf.page entomo), il n'y a pas d'oothèque, c'est-à-dire de "boîte à oeufs" regroupant tout ou partie de la ponte. Les oeufs sont en effet déposés un à un, ou par lots de quelques unités.
 
 
femelle de Locuste à pondre (photo 1) femelle de Locuste à pondre (photo 2) femelle de Locuste à pondre (photo 3).Grande sauterelle verte à pondre
Dame Locuste.fort occupée !
La Grande sauterelle verte à pondre ....une autre opportunité photographique rare !
 
Les oeufs, ci-dessous, sont rigides, brun foncé à gris noir, et logiquement très allongés (6 mm de long pour un diamètre de l'ordre du mm) afin de permettre le transit dans l'étroite gouttière formée par les valves de l'oviscape ( = tarière = ovipositeur). En dépit d'une taille assez conséquente les oeufs de cette sauterelle sont relativement nombreux, de 100 à 150, un comptage m'ayant permis d'en dénombrer 130.
 
exemples d'oeufs de la .... oeufs de la grande sauterelle verte .... "grande sauterelle verte" !
 
 
Les jeunes sauterelles éclosent courant avril, et 6 à 7 mues sont nécessaires à leur développement . Au fur et à mesure des stades larvaires les ébauches alaires s'affirment, tout comme la tarière des futures femelles (cf. ci-dessous).
 
 
larve âgée (femelle) de tettigonia viridissima fourreaux alaires de larve âgée (femelle) de tettigonia viridissima
Larve (en fait nymphe!) de femelle au dernier stade, c. a.d. juste avant le passage à l'état adulte.
Remarquer le déjà grand développement de la tarière, et celui des ébauches alaires (détail de ces dernières à droite).
 
 
Acridophagie !
 
Les criquets sont depuis toujours consommés, et c'est certainement l'insecte qui l'est le plus avec les termites. Cela tient à la taille généralement avantageuse de ces Orthoptères, mais aussi et surtout à leur facilité de récolte, y compris en quantités importantes. En règle générale il s'agit le plus souvent d'un complément alimentaire, la richesse en graisses et protéines compensant une nourriture carnée par ailleurs déficiente. Cela vaut pour bon nombre de peuples et peuplades, mais pour d'autres il peut simplement s'agir d'une véritable friandise. Par-delà les criquets de nombreuses espèces d'insectes, mais aussi de larves et nymphes peuvent être consommées d'où le terme plus général d'entomophagie (cf. page entomo).
 
Criquet égyptien (Anacridium aegyptium) photo 1 Criquet égyptien (Anacridium aegyptium) photo 2 Criquet égyptien (Anacridium aegyptium) tête de profil Criquet égyptien (Anacridium aegyptium) tête de face
Souvenir d'Andalousie !
Le Criquet égyptien (Anacridium aegyptium) fait partie de la douzaine de criquets ravageurs, et donc aptes à faire des "nuées". Ces espèces sont communément qualifiées de "criquets arboricoles" car elles aiment se poser sur les végétaux "ligneux" (arbustes par exemple), et à l'occasion s'y regrouper. Le criquet égyptien vit en zone méditerranéenne, et jusqu'au Moyen-Orient. Il atteint une longueur de 7 cm, pour le double en envergure Sur l'agrandissement de la photo à l'extrême droite, vous remarquerez la présence de 3 "ocelles" (= yeux complémentaires, et rudimentaires). Par ailleurs vous noterez la striation verticale des yeux, caractère propre à ces espèces
 
Sans entrer dans le détail des "recettes" on peut dire que les criquets sont véritablement consommés à toutes les sauces. A la base ils peuvent être grillés, séchés, bouillis, frits, crus, en encore réduits à l'état de pâte ou de farine, tout comme ils peuvent être incorporés ou non à d'autres aliments. Au plan purement nutritif ces insectes soutiennent aisément la comparaison avec les viandes dites rouges, comme le boeuf ou encore le mouton. Au niveau énergétique les termites l'emporteraient même très largement , notamment une fois desséchés, puisque 100 gr de ces derniers fournirait plus de 500 calories contre moins de 150 pour le boeuf.
 
Plus rares sont les arachnophages, c'est-à-dire les mangeurs d'araignées, mais il en est pour décortiquer les Mygales (Amazonie par exemple) comme nous le ferions d'une autre araignée....mais celle-là de mer!
 
A signaler enfin qu' une forme d'entomophagie, qui pourrait être qualifiée "de luxe", semble vouloir émerger en France. Bien entendu il s'agit plus d'un effet de mode, voire de pur snobisme, que d'une nécessité vitale. Pour preuve de cette émergence, apparemment très "tendance", la page "entomophagie" de mon site me vaut bon nombre de contacts......nettement plus culinaires qu' entomologiques!
 
 
Pour conclure.....
 
Je dirais avoir eu l'occasion, voici quelques années, de contribuer à un inventaire entomologique tout aussi révélateur que symptomatique. Il s'agissait de 2 "zones vertes" contiguës, l'une "aménagée" pour la détente et la promenade, l'autre laissée volontairement vierge et peu accessible. Dans cette dernière 24 espèces d'Orthoptères ("sauterelles" au sens large) ont été répertoriées, contre 2 seulement dans la première zone, encore s'agissait-il d'espèces nettement arboricoles, et par le fait préservées du dévastateur gyrobroyage.
 
Bien entendu ce qui valait pour les Orthoptères, valait également pour de nombreux autres insectes, mais aussi pour la faune (et la flore!) en général. Au final le verdict s'est avéré clair, net, et sans appel, d'où une prise de conscience des autorités, et une louable tentative de gestion plus respectueuse du site et partant de notre environnement.
 
 
 
FIN
 
les pages entomologiques d' andré lequet : http://www.insectes-net.fr