Toute règle a ses exceptions et mes "Pages entomo" aussi ! Par principe dévolues aux seuls insectes, la domiciliaire et très "speed" scutigère (Myriapode) a pourtant su y trouver place en vertu de son utilité. Hasard du menu alphabétique elle y figure entre la Rhysse et le Sirex, deux grands hyménoptères pas vraiment copains puisque la progéniture du premier se développe aux dépens de celle du second.
Présentation !
La Mygale à chaussette (Atypus affinis pour les arachnologues) doit cette curieuse appellation à sa tubulure soyeuse, dont la partie souterraine sert d'abri, et l'aérienne de piège nourricier. Cette araignée terricole est très thermophile ( = aimant la chaleur ! ), et par ailleurs qualifiée de mygalomorphe, ou encore de mygaloforme, en raison de sa ressemblance avec une mygale, mais aussi du fait de son appartenance au Sous-Ordre des Mygalomorphae, dont les vraies mygales relèvent elles aussi CQFD !
En dépit du particularisme de son mode de vie, cette araignée a bien sûr son lot de prédateurs, à commencer par d'autres araignées, des hyménoptères chasseurs ou parasites, des oiseaux, des rongeurs, sans oublier les redoutables .... semelles de chaussures ... et "binettes" jardinières ! Pour clore cette brève présentation, sachez qu'une autre "Atypus" (A. piceus), plus rare et moitié plus petite peut également se rencontrer "chez nous". La présence d'une 3e espèce (A. muralis) reste semble-t-il à confirmer. Toutes ces araignées ont des moeurs comparables, et selon "Wiki" la Famille des Atypidae compte pour l'heure 43 espèces au niveau mondial.
Si tout se passe bien l'espérance de vie de cette araignée est de l'ordre de 5 à 7/8 ans, le chiffre de 10 ans étant parfois avancé, mais j'avoue ne point trop y croire. La croissance étant lente, la maturité sexuelle (et donc l'aptitude à se reproduire) est atteinte la 4e année. Les femelles vivent à l'évidence plus longtemps que les mâles, ces derniers servant le plus souvent de "complément alimentaire" ... après un devoir dûment rempli !
La bête !
Avec une longueur de18 à 20 mm maxi pour la femelle, et une grosse dizaine de mm pour le mâle, cette miniature de mygale a néanmoins tout d'une grande, à commencer par des chélicères pouvant se qualifier d'hors normes ... et ça se voit ! Outre la taille, le dimorphisme porte sur la coloration, les mâles étant franchement noirs là où les femelles sont brun clair, du genre "café au lait". Cette araignée est connue pour ne pas être agressive, mais d'instinct sa manipulation impose néanmoins un minimum d'égards, si je puis dire, surtout si comme moi vous débutez dans le métier ... au pays des aragnes !
Dame Nature n'a pas lésiné sur le "matos", et les photos ci-dessous en témoignent ! Vous noterez que les chélicères comportent 2 parties articulées , à savoir le bien nommé "croc" ou "crochet", suivi de la glande à venin. Le tout fonctionne comme une seringue hypodermique, la quantité de venin injecté pouvant varier selon la nature des proies, avec possibilité de morsure dite "sèche" et donc sans venin. Par-delà leur fonction alimentaire, les chélicères ont bien sûr un rôle défensif, mais aussi un volet "travaux publics" puisqu'ils sont utilisés pour creuser le sol et déplacer les déblais.
Contrairement aux très communes épeires diadèmes qui tendent leurs toiles bien en vue au jardin, cette "mygale" est nocturne et sait parfaitement se dissimuler. Elle vit en effet en quasi permanence dans un tube de soie en majeure partie souterrain, l'extrémité inférieure restant ouverte et en contact avec le sol, là où la partie aérienne est parfaitement close ... tel le pied de vos chaussettes ! L'essentiel du camouflage est constitué de particules terreuses, de menus débris végétaux pouvant être incorporés au tissage. Ainsi dissimulée notre mini mygale a toutes les chances de tromper la défiance de ses proies, et à l'occasion de déjouer la curiosite du naturaliste, ou encore d'échapper à la binette inquisitrice du jardinier ! ... ou de la jardinière !
La chaussette ci-dessous a été trouvée sous un bac à fleurs (posé à terre bien sûr ! ), mais elle est le plus souvent tissée à même le sol, en principe avec une préférence pour les zones à végétation rase ou plus ou moins clairsemée, mais en pratique tout semble possible, l'exposition semblant prévaloir sur la nature du sol et de la végétation A titre d'exemple, et aussi étonnant que cela puisse paraître, j'ai trouvé 5 chaussettes dans une grosse touffe de montbretia, plante poussant pourtant très drue et de plus dotée de longues feuilles lancéolées issues d'innombrables bulbes.
Plus qu'un piège la partie aérienne de la chaussette fait office de détecteur, et il suffit qu'une proie potentielle s'y aventure pour générer une vibration et sur l'instant déclencher l'attaque de l'araignée. Les puissants et très acérés chélicères traversent sans peine la paroi soyeuse, tant pour tuer la proie, que pour y pratiquer une ouverture afin de rentrer le déjeuner à pied d'oeuvre. Filières aidant la chaussette sera ensuite "reprisée", et l'ouverture temporaire se verra ainsi refermée à plus ou moins brève échéance.