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- la RHAGIE
INQUISITRICE (Rhagium inquisitor)
!
- (Coléoptère
Cerambycidae)
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- Intro !
-
- Au fil des ans tout évolue, y
compris certaines dénominations vernaculaires, puisque la
Rhagie inquisitrice s'est d'abord appelée "Rhagie
chercheuse" (le Larousse agricole de 1921 faisant foi), avant de
se faire "inquisiteuse" en mai 2000, via "les
Coléoptères d'Europe" de Gaëtan du
Châtenet.
-
- L'occasion m'en étant
donnée, vous noterez que cette déclinaison
apparaît discutable, car non reconnue par l'actuel Larousse,
lequel permet cependant à une enquêtrice de se faire
enquêteuse si bon lui semble ! ... dure dure la "langue de
chez nous" !
-
- Finalement tout cela importe bien peu,
car depuis qu'elle a été baptisée
"inquisitor" par Linné ( 1758 ! ), la malheureuse bestiole
est condamnée à chercher pour
l'éternité, et nous le sommes à chercher ....
ce qu'elle est censée chercher !
-
- Présentation
-
- En dépit de ses courtes antennes,
et d'un aspect quelque peu atypique, ce petit
coléoptère (10 à 15 mm ) est un "longicorne",
autrement dit un "capricorne". Vous noterez que cette
dernière appellation n'est pas réservée au
fameux "Capricorne des maisons" (Hylotrupes bajulus, voir site),
lequel n'est autre qu'un longicorne ... "appréciant" nos
maisons ! ... CQFD !
-
- La Rhagie inquisitrice relève
bien sûr de la Famille des Cerambycidae, et partant des
quelques 230 espèces que compte notre faune. C'est
également la référente des Rhagium,
représentés en France par 4 espèces à
la biologie assez comparable .... les 3 autres étant
à découvrir en fin de page .... pour info
!
-
- La Rhagie inquisitrice ...
.. ( Rhagium inquisitor ! )
- .... exemplaire de collection
!
-
- En d'autres temps, le Rhagium inquisitor
était l'apanage des régions montagneuses, et des
grandes pinèdes du Sud, mais son extension s'est quasi
généralisée, suivant en cela la
multiplication tous azimuts des plantations de résineux.
Par-delà cette répartition géographique
"à la française", vous noterez que la bestiole est
largement présente hors de nos frontières, comme les
3 autres espèces d'ailleurs, mais qu'elle est la seule
à "inquisitionner" ( si je puis dire ! ) sur 3 continents
(Europe, Asie, Amérique).
-
- Les critères du dimorphisme
sexuel sont à la fois multiples, et peu patents, ce qui se
traduit (selon le "Planet") par une succession de "plus" chez le
mâle.... et autant de "moins" chez la femelle.
Concrètement, le mâle est plus petit et plus
élancé; la tête est plus large avec des yeux
plus volumineux et des tempes plus marquées; les antennes
sont plus longues et plus grêles; les pattes sont
également plus longues, avec fémurs plus
allongés, plus renflés, et tarses plus
élargis ! Au final, et vous l'aurez compris, il n'est pas
facile de s'y retrouver, sauf à disposer des 2 sexes (
attention aux grands mâles, et aux petites femelles! ) ...
ou à tomber sur un accouplement !
-
-
-
- .... mais que cherche donc
la Rhagie !
-
- Au terme de cette présentation
vous noterez que les Rhagies sont des insectes d'espaces
boisés, avec un faible pour les lisières,
clairières, grandes allées, coupe-feux, etc... ,
même s'ils peuvent parfois subsister en milieu bocager,
là où la pression agricole n'est pas trop intense.
Vous noterez enfin que ces insectes volent aisément, mais
ne sont pas très attirés par les fleurs, encore que
R. mordax puisse se laisser tenter par l'aubépine, le
sureau, ou encore les ombellifères. La femelle du
sycophante passe également pour pouvoir butiner .... mais
je ne saurais l'affirmer !
-
- La larve
-
- Elle se développe uniquement dans
les conifères (Pinus, Larix, Abies, Picea, Cedrus), et
uniquement sous l'écorce des bois morts, tombés ou
abattus, et à l'occasion des arbres
dépérissants. La durée du
développement est habituellement de 2 ans, mais là
où les conditions climatiques sont moins favorables (en
montagne par exemple), une troisième année est
souvent nécessaire.
-
- Les oeufs sont classiquement pondus au
printemps, dans les anfractuosités de l'écorce, et
la jeune larve s'installe très vite entre l'aubier et
l'écorce en question. Elle hivernera une première
fois à l'état de larve, puis reprendra son
évolution au printemps, et la poursuivra jusqu'à la
fin de l'été. Elle sera alors au terme de sa
croissance, et atteindra une petite trentaine de mm.
-
-
-
-
- Panel ( photographique ! ) de la
larve à terme de Rhagium inquisitor.
- Via l'habituelle allumette, et la non
moins rituelle "prise en main", vous noterez les formes et
proportions de la bestiole. Vous noterez également la
conformation des mandibules, et surtout l'aplatissement
très important de la tête (ci-dessous à
droite), qui tel un coin, permet à la larve d'
évoluer à l'interface du bois et de l'écorce,
tout en grignotant ce qui doit l'être pour se nourrir ou
cheminer.
-
-
-
-
- La nymphe
-
- A l'aube de son 2e automne, et donc
parvenue au maximum de sa taille, la larve va construire une
logette pouvant se qualifier de "nidiforme". Toutes proportions
gardées, elle ressemble en effet à un nid d'oiseau
en miniature, et sa réalisation témoigne à
l'évidence d'un savoir faire assez surprenant ... fut-il
instinctif ! J'ajouterais que ce "nid" requiert à coup
sûr beaucoup de temps, et de travail, car l'arrachage des
fibres de bois n'est pas mince affaire, sans parler de leur
entrelacement.
-
- Une fois l'ouvrage terminé, et en
quelque sorte jugé conforme, la larve s'immobilise, et
entre en phase prénymphale La mauvaise saison approchant,
les choses ne traînent pas, et la formation de la nymphe est
très vite suivie de celle de l'insecte dit "parfait", et
donc apte à se reproduire. La bestiole devra cependant
patienter, et hiverner une seconde fois, l'abandon de la logette
se faisant au printemps ... conformément aux règles
édictées par Dame Nature !
-
-
-
- En présence de loges
nymphales aussi parfaitement conçues, il est bien difficile
de ne pas penser au nid. des oiseaux.
- Dans cet esprit, vous remarquerez
l'entrelacement des fibres aubieuse du bois, et le fait qu'elles
sont arrachées par la larve.
Bien entendu, les larves "in situ" sont ici
en pré-nymphose. A droite: il s'agit d'un vieux
"nid", parfaitement conservé, grâce à sa
robustesse, son comblement, et bien sûr la protection de
l'écorce
-
-
-
- Il s'agit là de
très jeunes nymphes, car la pigmentation oculaire, la toute
première à se manifester, n'est pas encore
commencée
-
-
-
- à gauche: 6 jours
après les clichés ci-dessus;
- au centre:
éclosion imminente ! ....48 h après le cliché
ci-contre!
- à droite: tout
frais éclos .... juste après "étalement" des
élytres.
-
- ... la suite
logique !
-
-
- Rhagie inquisitrice
âgée de quelques jours, et donc immature, comme le
prouve l'abdomen incomplètement
résorbé.
-
- L'intrus
-
- Les insectes entomophages parasites
jouent un rôle prépondérant dans la
régulation des espèces, et partant dans
l'équilibre des écosystèmes. Leur
efficacité est redoutable, et la page entomo sur la
Piéride du chou illustre parfaitement le propos. Ces
"parasites utiles" sont très souvent des
Hyménoptères, Braconidae et Ichneumonidae notamment,
mais aussi des Diptères Tachinidae, sortes de mouches
souvent fort banales ... en apparence !
-
- Les illustrations ci-dessous se
rapportent a Dolichomitus imperator, grand ichneumon qui traque
à l'odeur les larves de longicornes et de buprestes. La
bestiole est dotée d'une tarière
démesurée qui va lui permettre de percer
l'écorce, et le bois le cas échéant,
jusqu'à atteindre la larve du coléoptère, et
y déposer un oeuf .... la suite se passant de commentaire
!
-
- Chez cet ichneumon le perçage du
bois est particulièrement original. Une fois la future
victime repérée le parasite dégaine
littéralement sa tarière, la positionne
verticalement .... et tourne autour ! En fait il s'agit le plus
souvent d'une succession de déplacements en arcs de cercles
(peu fréquemment de tours complets), tantôt vers la
droite, tantôt vers la gauche, en alternance avec des phases
de "sur-place" ... la tarière restant toujours en action.
Sous l'effet conjugué de cette rotation, et de la pression
verticale exercée par la bestiole, la tarière
pénètre le bois tel un foret ... ou une
tarière de menuisier !
-
-
- Certaines loges étaient
squattées par une larve d'Hyménoptère
Ichneumonidae (Dolichomitus imperator) ...
- .... le locataire légal
ayant bien sûr servi de "déjeuner(s)"
!
- Ces 2 photos montrent des larves
au terme de leur croissance, et telles que trouvées;
à droite: larve en
prénymphose.
-
-
-
- Illustration du "coconnage" du
parasite, cette fois en logette
artificielle
-
-
- .... et re-suite
logique !
-
-
- Dolichomitus imperator .... ou
espèce voisine !
- Compte tenu de la taille de la
larve, j'espérais une femelle avec sa spectaculaire
tarière.
- Comme moi, vous devrez vous
contenter d'un mâle ... mais je n'ai pas dit mon dernier mot
!
-
-
- Pour info .... les autres
Rhagies
-
- Outre Rhagium inquisitor, la faune
française comporte 3 autres espèces, plus ou moins
fréquentes sur l'ensemble du territoire. Le Rhagium
sycophanta (Rhagie sycophante), moins courant dans le midi, est le
plus gros de tous (15 à 25 mm), et sa larve se
développe surtout sous l'écorce des chênes
abattus, tombés, ou encore
dépérissants.
-
- Le Rhagium mordax (Rhagie mordante),
15-20 mm, limite rare, se rencontre surtout dans les
régions du Nord et du Centre. La larve, très
polyphage, s'accommode de nombreux feuillus, voire de
conifères à l'occasion.
-
- Le dernier, Rhagium bifasciatum (Rhagie
à deux fascies), 15-20 mm, est quasi commun partout. La
larve se développe le plus souvent dans les vieilles
souches de feuillus et de résineux. Vous noterez enfin la
variabilité de mordax, et plus encore celle de bifasciatum
avec plusieurs dizaines de formes individuelles .... pas toujours
très convaincantes !
-
- à gauche: Rhagium
sycophanta; à droite: Rhagium
mordax
-
-
-
- à gauche: Rhagium
bifasciatum, morphe normale; au centre: forme unifasciatum;
à droite: forme ecoffeti.
-
- ... et là sur le vif
!
- Rhagium bifasciatum
!
-
- Larves et adultes ... tous
azimuts !
- Contrairement à
inquisitor la larve vit en plein bois, d'où une tête
"normale", autrement dit non aplatie.
- Vous noterez également
qu'il n'y a pas de "nid", mais une simple logette.
-
-
-
- Rhagium sycophanta
!
-
- Rhagium sycophanta
.... trouvé butinant sur ombellifère
!
-
- ..... et pour Rhagium mordax
.... merci d'un peu patienter !
-
-
- En guise de conclusion
....
-
- Les longicornes ont parfois la dent
dure, et bien souvent l'entomologiste débutant l'apprend
très vite à ses dépens. A cet égard
les Rhagium sont un excellent exemple, et la Rhagie mordante ne
s'appelle pas ainsi sans raison. Certes votre épiderme n'a
pas grand-chose à craindre de ces petites espèces,
mais si vous avez déjà des insectes dans votre
flacon de chasse ( surtout vivants ! )... n'y mettez jamais un
Rhagium ! .... sous peine de retrouver vos bestioles avec pattes
et antennes plus ou moins en "kit" ... et plutôt plus que
moins ! J'ajouterais avoir involontairement testé avec des
carabes bretons .... et je n'ai pas été
déçu !
-
- Cette "page entomo" a fait
l'objet d'une publication, dans la revue "INSECTES" de l'OPIE
(N° 158, 3e trimestre, 2010)
-
-
FIN
-
-
- les pages entomologiques d'
andré lequet
: http://www.insectes-net.fr