Connu dès le paléolithique, excusez du peu, le gisement de minerais d'étain (cassitérite) d'Abbaretz (Loire-Atlantique), a été redécouvert en 1877, puis brièvement exploité à 2 reprises entre 1917 et 1957 date de sa fermeture définitive. Il s'en est suivi un retour à la nature, sous la forme d'une carrière ennoyée de 15 ha pour une profondeur atteignant 40 m, mais aussi et surtout un impressionnant terril témoignant de l'extraction à ciel ouvert menée lors de la seconde et dernière période d'exploitation. Culminant à 121 m au-dessus du niveau de la mer, ce terril à l'étonnante blancheur est le point culminant du département. En 1996, la partie lac a été acquise par le Conseil Général, et celle du terril est devenue propriété communale. De nos jours la "Mine" est une base de loisirs très appréciée y compris des naturalistes !
Suite à la découverte d'une micro nichée de Sitaris muralis, fort curieusement située (voir la "page entomo" dédiée), l'idée m'est venue d'aller "jeter un il" à Abbaretz (à moins d'une 1/2 h de route) où la zone du terril comporte de nombreuses et très favorables "falaises" sablo-schisteuse, également appréciées des hirondelles de rivage venant y nidifier.
A défaut de Sitaris mon attention a de suite été captée par la présence de très actifs petits coléoptères manifestement en quête de partenaires. Leur aspect rappelant celui des Sitaris, leur identité s'est très vite imposée en tant que Stenoria analis. L'occasion était évidemment trop belle pour la laisser passer, d'où la présente "page entomo" que je vous invite à découvrir
Pour l'avoir appris ultérieurement, j'ajouterais que cet insecte méridional, ayant fortement tendance à "remonter", était seulement connu d'Assérac et Mesquer pour la Loire-Atlantique (Gilles Mahé, Osmia N°2, 2008). La localité d'Abbaretz est donc nouvelle pour ce département, tout comme celle de Pénestin (non figurée) découverte un mois plus tard (18 septembre 2017 ! ) lors d'une balade ... digestive !
Dans le grand jeu des Familles d'insectes, les Meloidae tiennent à coup sûr une place à part en raison de murs parasites pouvant se qualifier d' hors normes. La "page entomo" dédiée au Sitaris muralis en témoigne, mais avec Stenoria c'est encore " plus pire" :-) !
Là où le bien nommé sitaris des murailles se contentait de vivre sa vie au plus près du nid de ses hôtes, et parfois même d'en squatter l'entrée pour mieux y déposer sa ponte, les Stenoria analis préfèrent les grandes envolées, les pariades ensoleillées, et les pontes au revers des feuilles.
Autant dire que les minuscules triongulins ( = larves primaires des Meloidae) sont bien loin d'être rendus à pied d'uvre, car le fait d'être exceptionnellement dotés de 3 griffes aux pattes ne donne pas des ailes, et il en faudrait pour gagner les nichées souterraines d'abeilles solitaires qu'ils sont chargés de parasiter ... puisque "programmés" à cet effet !
Comme vous le verrez Dame Nature s'est encore une fois surpassée, et on ne peut qu'être confondu par l'inventivité de la Vie, les voies de l'Evolution étant souvent aussi impénétrables que celles du Seigneur !
Les "protagonistes" !
Par sa petitesse (au plus une douzaine de mm), et sa très ordinaire coloration, ce coléoptère "cleptoparasite" (*) apparaît bien banal, si ce n'est insignifiant. Par contre ses moeurs valent vraiment le détour, encore faut-il que vous preniez la peine de me lire ... d'où mon insistance !
Vous noterez que les abeilles solitaires vivent ... en colonies ! Le paradoxe n'est qu'apparent car chaque femelle nidifie pour son propre compte. Ces pseudo-colonies, appelées "bourgades", peuvent regrouper de très nombreuses nichées souterraines. Pour impressionnantes qu'elles soient ces vrombissantes bourgades sont sans danger, les abeilles Colletes n'étant pas du tout agressives. Les femelles étant néanmoins dotées d'un aiguillon, mieux vaut éviter de les prendre en main. J'ai d'ailleurs testé, et si la douleur est bien réelle, son ampleur et sa durée sont nettement limitées en regard des piqûres plus "traditionnelles".
(*) Se dit d'insectes vivant ou se développant aux dépens de la nourriture produite ou collectée et amassée par d'autres insectes.
Chez tous les insectes la pérennité d'une espèce en un lieu donné est toujours soumise à de multiples contingences et aléas, d'où la nécessité de ne pas mettre tous les oeufs dans le même panier. C'est ainsi que le "gros de la troupe" est toujours encadré par des individus précoces, mais aussi des retardataires ... des fois que !
Cela vaut bien sûr pour Stenoria analis, mais la "saison des amours" semblant se confondre avec sa courte durée de vie, j'ai moi-même été ... pris de court :-) ! En d'autres termes peu importe si la météo daigne largement sourire, quand c'est plus l'heure, c'est plus l'heure, et là où les bestioles abondaient plus rien ne volait, à l'image de ceux gisant au fond de mon enceinte d'élevage. Vous l'aurez compris, étant quelque peu "resté sur ma faim", RDV a été pris pour l'année prochaine ... inch'Allah !
Par contre les joncs des cuvettes humides semblent délaissés au profit des saules, et les "fausses bruyères" ( = Callunes ! ), abondantes par places, ne sont pas plus appréciées. Ces dernières se prêtant sans doute mal au dépôt des oeufs ( et à coup sûr à leur recherche ! ) j'y ai trouvé une seule ponte à l'état de larves ( ci-contre ! ) ... et il m'a fallu insister !