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 Les DYTIQUES !
(Genres Dytiscus & Cybister, Coléoptères Dytiscidae)
 
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La larve !

Les pontes ont lieu au printemps, sauf chez le précité "dytique d'hiver". Elles sont échelonnées, et via l'ovipositeur de la femelle, les oeufs sont insérés dans la tige de végétaux suffisamment "tendres". L'incubation est courte, de l'ordre d'une dizaine de jours, et le développement des 3 stades larvaires non moins rapide (5 à 6 semaines).

Dans ses milieux de prédilection, que sont les eaux dormantes très végétalisées, la larve de dytique se déplace avec beaucoup d'aisance. Au besoin sa tête plate y fait office de coin, le corps très souple et fuselé ne demandant qu'à suivre. Frangées de courtes soies, ses longues pattes lui permettent bien sûr de "crapahuter" tous azimuts, mais aussi de nager en "pédalant" tel un chien, là où la brièveté du déplacement ne nécessite pas (ou interdit) plus véloce technique. Pour des déplacements plus conséquents la souplesse corporelle permet un très efficace mode ondulant, à la manière des dauphins. En situation d'urgence la bestiole peut booster sa fuite, ou encore "démarrer plein pot", l'abdomen replié se détendant instantanément tel un ressort ... mode crevettes !

Les larves du Genre Dytiscus sont plus trapues que celles des Cybister, et elles se distinguent aisément par la présence, à l'extrémité abdominale, de 2 "pseudo-cerques" ( les "urogomphes") entourant les orifices respiratoires.

 
Larve de dytique,photo 1. Larve de dytique,photo 2 Larve de dytique,photo 3 Larve de dytique, gros plan. Larve de dytique, vue ventrale.
Le "tigre des eaux douces" dans son élément. Il n'est pire rencontre ... y compris pour vos doigts !
Les jeunes larves de dytiques sont à coup sûr vulnérables, mais à un stade plus avancé les prédateurs doivent y regarder à 2 fois car la morsure est particulièrement douloureuse, et longue à s'estomper ... comme déjà dit :-) ! ci-dessous : larve à terme sous la toise !
Larve de dytique sous la toise !
 
Longuement falciformes, et très acérées, les mandibules sont dotées d'un canal permettant à la larve d'injecter une sécrétion censée être toxique, afin de paralyser puis tuer la proie. Pour l'avoir à plusieurs reprises constaté, les proies en question font souvent mieux que résister, y compris à l'action généralement répétée des vétritables poignards que sont les mandibules. J'avoue un réel étonnement car la morsure de ces larves est à coup sûr bien plus douloureuse et prolongée que celle d'un frelon ... et encore une fois je parle en connaissance de cause !

Ces mandibules permettent également d'injecter les sucs digestifs, puis d'absorber les tissus ainsi liquéfiés, d'où la notion de "digestion extra-intestinale". Suivant la nature et le volume du "déjeuner" les coups de mandibules peuvent se multiplier, et l'action mécanique ajouter aux "enzymes gloutons". A terme il peut s'ensuivre une proie plus ou moins "destroy", voire totalement méconnaisable à l'image du vairon ... à découvrir ci-après !

 
Larve de dytique, tête vue dorsale, photo 1. Larve de dytique, tête vue dorsale, photo 2 Larve de dytique, tête vue dorsale, photo 3 ..............Larve de dytique, tête vue  ventrale
ci-dessus : "portraits" .... recto-verso ! ci-dessous à gauche : voila le genre de photo ( sur le vif ! ) qui doit tout à un chanceux hasard, et serait quasi impossible à réaliser si on voulait la faire; à droite (ph. 1 ) : extrémité caudale montrant les 2 "faux cerques", ciliés et hydrophugés, qui s'étalent à la surface de l'eau et maintienne les orifices respiratoires en bonne position; ( ph. 2 ) : parfaite illustration "in situ" du dispositif respiratoire venant d'être décrit.
Larve de dytique, tête vue de face ..............Larve de dytique,  pseudo cerques Larve de dytique, orifices respiratoires.
 
 
Illustration de la prédation !

Parfois qualifiées de "tigres d'eau douce", les larves de dytiques sont très voraces, et exclusivement carnassières ... voire cannibales à l'occasion ! Les proies potentielles sont nombreuses et variées (têtards en tous genres, alevins, grenouillettes, larves de tritons et salamandres, larves de libellules, vers, voire gastéropodes aquatiques et même larves de phryganes ... faute de mieux ! ).

La chasse à l'affût est quasi de règle, et compte tenu des besoins et modalités respiratoires, la bestiole se tient le plus souvent tête en bas ( mandibules grandes ouvertes tant qu'à faire ! ) l'extrémité abdominale à fleur d'eau, en position "prise d'air" . Ce faisant l'affût peut longuement se prolonger, là où il n'excèderait pas les 2 minutes en pleine eau, faute de pouvoir s'y oxygéner. En totale immersion, et si "p'tit creux" il y a, toute proie passant à portée est attaquée. Comme chez de nombreux prédateurs c'est le mouvement qui déclenche l'attaque, sa fulgurance ajoutant à son efficience.

 
Larve de dytique mangeant un têtard, photo 1. Larve de dytique mangeant un têtard, photo 2 Larve de dytique mangeant un têtard, photo 3 Larve de dytique mangeant un têtard, photo 4.
Quand l'appétit va, tout va ... y compris au pays des " tigres d'eau douce" !
Par leur nombre, la facilité de leur capture, et leurs généreuses rondeurs, les têtards de batraciens sont en quelque sorte "plébiscités".
 
 
Larve de dytique mangeant une larve de libellule, photo 1. Larve de dytique mangeant une larve de libellule, photo 2. Larve de dytique mangeant une larve de libellule, photo 3. .............Duo de larves de dytique mangeant une larve de libellule, photo 1. uo de larves de dytique mangeant une larve de libellule, photo 2.
Toutes les larves de libellules font ventre, y compris celles de grande taille comme cette aeschne parvenue au dernier stade larvaire ( que 2 convives finissent pas se disputer ! ); ci-dessous : la chitine n'étant pas "digérable" il ne reste souvent que "l'emballage", sorte d'exuvie post-mortem. Cela vaut bien sûr pour les petites larves, le volume de nourriture des plus grandes dépassant les capacités "stomacales" des prédateurs.
 larve de libellule "vidée" par une larve de dytique, photo 1. larves de libellules "vidées" par une larve de dytique, photo 1. larve de libellule "vidée" par une larve de dytique, photo 2
 
 
 
Larve de dytique mangeant  un vairon, photo 1. Larve de dytique mangeant  un vairon, photo 2. Larve de dytique mangeant  un vairon, photo 3. Larve de dytique finissant de manger  un vairon,.
Les petites espèces de poissons, et alevins en tous genres, sont aussi très appréciés, mais leur vivacité ne facilite pas les captures.
ci-dessus : ce vairon de petite taille a été presqu'entièrement consommé. Entre la première et la dernière illustration, près de 2 h se sont écoulées; ci-dessous : cette fois la taille du poisson est conséquente, et sans doute proche du maximum. Là encore une seconde larve a profité après coup de l'aubaine, et les 2 prédatrices se sont très vite entendues pour ripailler ... et "respirer" de concert ! à gauche : sans doute attiré par les sanglantes effluves, et la perspective d'un futur repas, un dytique adulte a eu la bonne idée d'idéalement compléter la scène, tout comme la grenouillette de l'arrière-plan. ... découverte a posteriori !
Duo de larves de dytique mangeant un poisson, photo 1. Duo de larves de dytique mangeant un poisson, photo 2. Duo de larves de dytique mangeant un poisson, photo 3. Duo de larves de dytique mangeant un poisson, photo 4.
 
 
.... et du cannibalisme !
 
Larves de dytique, illustration du cannibalisme, photo 1. Larves de dytique, illustration du cannibalisme, gros plan. Larves de dytique, illustration du cannibalisme, photo 2.
La bestiole a guère d'ennemis ... hormis ses propres congénères !
En pareil cas, mieux vaut mordre la première !
 
... avec vidéo récapitulative sur la prédation !
Craignant les "foudres" Youtubiennes (*) la phase initiale de la prédation n'est pas montrée !
 
(*) Ayant déjà été sanctionné à 2 reprises, sur dénonciations, je préfère évidemment ne pas prendre de risques car au 3e avertissement mes 150 vidéos risquent de passer à la trappe ! La 1ere suppression de vidéo, pour violence ( sic ! ), concernait la piqûre d'un insecte bien connu des literies. La seconde suppression a sanctionné un accouplement d'insectes ... jugé pornographique ( re-sic ! ). Je vous laisse le soin de qualifier les "plaignants", car en matière de violence et de pornographie je pense qu'il y a pire ! Reste qu'il m'a fallu faire appel, et donc batailler pour être "blanchi" et obtenir la réintégration des vidéos injustement censurées.
 
Nymphose et mue imaginale !

A terme les larves avoisinent les 6 cm, et elles quittent l'eau pour se nymphoser à terre. La finesse des mandibules et des membres semblant peu adaptée au fouissage, on imagine volontiers des logettes nymphales superficielles et rudimentaires, ou encore aménagées sous une pierre, un morceau de bois mort, un amas de détritus végétaux. En fait les pierres plates et plaques de mousse mises à disposition ont été dédaignées au profit de logettes creusées en pleine terre, leur profondeur atteignant les 5 cm ... et le fond de l'aquaterrarium !

 
Dytique  : nymphe en loge, photo 1 Dytique  : nymphe en loge, photo 2............ Dytique : urogomphes, photo 1. Dytique : urogomphes, photo 2............. Dytique  : nymphe en loge, photo 3 Dytique  : nymphe en loge, photo 4
à gauche : position typique de la nymphe en loge. Comme celle de l'hydrophile elle repose sur les urogomphes de l'extrémité abdominale, ces derniers jouant le rôle de pilotis afin d'isoler la bête d'un substrat souvent très humide; au centre : ... les "pilotis", si je puis dire ! à droite : exemples de nymphes en loges. Vous noterez la perfection de la logette, sa sphéricité, l'importance de son diamètre (3 cm), et la finesse de son lissage intérieur. Vous noterez également les exuvies larvaires plaquées sur la paroi (pareillement visibles à gauche).
 
 
Dytique : nymphe en vue ventrale, photo 12 Dytique : nymphe en vue latérale Dytique : nymphe avec allumette-échelle. Dytique venant de faire sa mue imaginale.
ci-dessus : nymphe avancée ( et même très avancée ! ) comme l'atteste l'imago femelle découvert 17 h plus tard ... à 4 h du "mat" !
ci-dessous à gauche : nymphe récemment formée, la pigmentation commençant classiquement par les yeux, les mandibules, et les "ongles" (onichium ! ) des pattes; à droite : 30 h plus tard , imago mâle juste "né", et donc superbement immaculé ! Vous noterez que le "doublon" présenté résulte d'un éclairage un peu différent, et surtout de l'impossibilité de choisir l'un ou l'autre, tant cette vivante et diaphane blancheur est belle.
Dytique : nymphe en vue ventrale, photo 1. ..............Dytique, mue imaginale, photo 1. Dytique, mue imaginale, photo 2.
 
 
 
Dytique, mue imaginale, photo 3. Dytique, mue imaginale, vue ventrale. Dytique, mue imaginale,  détail en vue ventrale. Dytique, vue de face au cours de la maturation.
ci-dessus : l' "immaculé" hors logette, puis en vue ventrale avec détail, et enfin de face au cours de la maturation.
ci-dessous : aperçu de l'acquisition des couleurs, et donc de la "chromatogenèse". Température quasi caniculaire aidant, en 24h la "messe est dite".
La sclérification ( durcissement des téguments ! ) est nettement plus longue, de l'ordre d'une petite semaine.
Dytique, illustration de la chromatogenèse, photo 1. Dytique, illustration de la chromatogenèse, photo 2 Dytique, illustration de la chromatogenèse, photo 3 Dytique, illustration de la chromatogenèse, photo 4 Dytique, illustration de la chromatogenèse, photo 5.
 
 
Epilogue !
Au pays des dytiques tout va très vite, de 12 à 15 jours s'écoulant entre l'enterrage de la larve et la mue imaginale, et de 5 à 7 jours entre cette dernière et la sortie à l'air libre de la bête ... laquelle gagne l'eau illico !
 
en haut : femelle D. marginalis ! dytiques, mâle et femelle, issus d'élevage. en bas : mâle de D. dimidiatus !
 
 
Quid des nuisances !

Elles sont à mon sens fort limitées, pour ne pas dire symboliques, car la "mauvaise réputation" du Dytique est passablement surfaite. Certes la bestiole n'est pas forcément la bienvenue dans une installation piscicole (par exemple), mais sauf à pulluler elle y serait finalement plutôt bénéfique. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, tout prédateur contribue finalement à la bonne santé de ses proies ( si je puis dire ! ), en éliminant les individus les plus faibles, qu'ils soient malades, "racho", vieillissants, ou autre. A titre d'exemple un lapin en pleine forme échappera plus facilement au renard que le garenne "myxomateux", et une fois ce dernier croqué par le Goupil de service la propagation de la maladie se verra réduite d'autant.

Toujours au chapitre des "nuisances", le Dytique qui s'égare dans la limpidité bleutée et miroitante d'une belle piscine peut faire désordre. A l'occasion il peut même effaroucher quelques jeunes et jolies naïades ... voire de moins jeunes et jolies ! En pareil cas c'est évidemment le branle bas de combat, et aussi l'occasion d'apprécier ( si l'on peut dire ! ) la rapidité des évolutions de la bestiole, car elle est rarement décidée à s'en laisser conter, et encore moins à finir dans une épuisette. Si pareille mésaventure vous arrive, et que l'épuisette en question s'avère définitivement inopérante, il est parfaitement inutile d'en référer à l'Institut des Pêches, ou pis de vouloir vider votre piscine. Sachant qu'un bain de chlore n'est pas précisément la tasse de thé de tout Dytique normalement constitué, l' "affreuse bestiole" repartira très vite vers une destination à son goût moins ... polluée ! 

En guise de conclusion ...

... et afin d'illustrer les propensions nécrophages des Dytiques, mais aussi l'intérêt écologique de ces insectes.

C'était dans les marais de Loire, et un ami y avait une batterie de "bosselles" (= nasses) à anguilles, qu'il avait d'ailleurs quelque peu tendance à parfois "oublier" !

A l'époque les rats musqués abondaient en ces lieux, et bon nombre de jeunes rongeurs se fourvoyaient dans les fameuses bosselles, et bien sûr y périssaient noyés. Il me souvient aussi des mêmes engins, appâtés avec des têtes de poulets censées attirer les anguilles ...

Pareillement tentés par ces charognes, il me souvient surtout des Dytiques qui se faisaient piéger par centaines, et finissaient eux aussi noyés, faute de pouvoir aller quérir une salvatrice bulle d'air !

 
FIN
 
les pages entomologiques d' andré lequet : http://www.insectes-net.fr