La Rhysse persuasive (Rhyssa persuasoria) fait partie des plus grands Ichneumons de notre faune, mais aussi d'Europe, et c'est notamment l'ennemie jurée des larves du Sirex géant (cf. page entomo dédiée). Comme sa cousine Rhyssa amoena, ou encore Dolichometus imperator (cf. page entomo "Rhagium inquisitor") ces Hyménoptères sont qualifiées de "parasitoïdes", car leur développement larvaire provoque à terme la mort de l'hôte, alors qu'un vrai parasite se contente de vivre à ses dépens. Ce sont également des "ectoparasites" car leurs larves se développent à l'extérieur de l'hôte, là où celles des "endoparasites" évoluent en interne ... CQFD !
Le dimorphisme sexuel et l'accouplement !
Comme les illustrations ci-dessous le montrent, les très visibles organes de pontes que sont les tarières étant bien sûr l'apanage des femelles, les mâles en sont non moins logiquement dépourvus. Par-delà l'évidence du dimorphisme sexuel, les préludes à l'accouplement proprement dit font mieux que valoir le détour !

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En Loire-Atlantique, et donc là où je réside, les bestioles sont actives à compter de la mi-Mars, par temps ensoleillé s'entend. Les vols s'observent dès 10 h du matin (heure légale), moyennant une température minima de l'ordre d'une douzaine de degrés. Evoluant plus ou moins en "rase-mottes" les mâles en maraude ne cessent de survoler les grumes de sapin blanc (Abies alba pour les intimes !). Ces quêtes aériennes sont entrecoupées de phases exploratoires pédibus, charge aux extrémités antennaires ( là encore typiquement recourbées ! ), d'y détecter les indices (grignotages par exemple) laissant présager une future émergence. Au fil des jours, en l'espace d'un mois, les effectifs des 2 sexes ne cessent d'évoluer, le quota des mâles régressant, là où celui des femelles actives progresse, ces dernières étant pareillement vouées à peu à peu disparaître une fois la ponte achevée.


Face à tous ces mâles prêts à littéralement lui "sauter dessus" la femelle donne la nette impression de temporiser, tant elle semble hésiter à affronter une telle cour de prétendants à l'évidence "chauds bouillants". Quand elle se décide à sortir de son trou, ce qui peut demander "un certain temps" faute de déterminisme avéré, la ruée est alors immédiate. Il s'ensuit une mêlée pour le moins indescriptible, pouvant regrouper et même dépasser la dizaine de "concurrents". Il faut également compter avec des retardataires, s'efforçant avec plus ou moins de succès d'insinuer leur abdomen au cur de la grouillante effervescence ... en l'espoir ( le plus souvent vain ! ) de faire mieux que simplement participer !
Alors que le percement du trou de sortie témoigne évidemment du quasi achèvement du processus de sclérification ( = durcissement des téguments ! ), la longue tarière des femelles reste au contraire aussi rigide qu'un brin de laine, ce qui lui permet de subir sans dommages la furia sexuelle des mâles, avant d'elle-même se sclérifier et d'ainsi devenir apte à forer le bois ... et y pondre !
Bien que ce soit "fait pour", le sort des femelles paraît bien peu enviable tant elles sont assaillies de toutes parts, brassées en tous sens, pour ne pas dire malmenées voire brutalisées. A terme elles donnent l'impression d'être quelque peu "sonnées" ( on le serait à moins ! ), et c'est encore plus vrai quand il s'agit de petites femelles face à des "gros bras". Si les violences sexuelles animales étaient condamnables Dame Nature aurait à coup sûr du souci à se faire !
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A la fin il n'en restera qu'un (comme dans Koh Lanta !), les laissés pour compte de cette peu banale mêlée n'ayant d'autre choix que celui de se remettre en quête. Bien qu'il soit semble-t-il unique (observations aidant, et spermathèque faisant) cet accouplement contribue à pérenniser l'espèce, et pour Dame Nature c'est là l'essentiel. Ainsi va la Vie au pays des Rhysses, et cette exceptionnelle vidéo en témoigne parfaitement. Par contre, en regard d'accouplements nettement plus conventionnels, et habituels, on est en droit de penser ... "tout ça pour ça" !
De même que les voies du Seigneur sont dit-on impénétrables, Dame Nature a de toute évidence ses raisons que la raison ignore. Telle sera la conclusion d'un chapitre que j'ai eu beaucoup de plaisir à écrire et illustrer, et plus encore à découvrir "in situ" ... au prix d'une très chronophage assiduité !
